En 1945, à Paris, le retour des déportés survivants se fait à l’hôtel Lutetia. Fabienne Blanchut, Catherine Locandro et Dawid y placent l’intrigue des Cheveux d’Edith.
Si le sujet des camps de la mort est abondamment traité en bande dessinée, le retour des déportés est un peu l’angle mort de cette tragédie. À l’époque, la monstruosité inconcevable des nazis, la volonté d’oublier les horreurs de la guerre et la culpabilité des survivants de ne pas avoir subi le même sort que leurs proches, avaient jeté un voile opaque sur cette expérience indicible. 80 ans plus tard, Fabienne Blanchut et Catherine Locandro s’emparent de cette thématique en situant l’action des Cheveux d’Edith en mai 1945, à Paris, dans les murs de l’hôtel Lutetia. Depuis avril de la même année, le palace est en effet transformé en centre d’accueil pour les rescapés des camps qui arrivent par vagues régulières. Et il faut des bénévoles pour s’occuper d’eux.

Extrait de "Les cheveux d'Edith" : Printemps 1945. Juché sur sa bicyclette, Louis, jeune lycéen prometteur, parcourt Paris libéré depuis peu, passant de ses révisions pour le baccalauréat à son travail au cinéma Pax © Dargaud
En passant par curiosité dans l’hôtel, Louis, lycéen qui prépare son bac, sent qu’il doit aider. Malgré l’interdiction de son père, il se rend chaque jour au Lutetia. Il y croise Edith, profondément traumatisée par ce qu’elle a vécu, murée dans le mutisme. Louis va tout faire pour l’extraire de cette prison mentale. À travers les yeux du jeune homme, et le dessin tout en sensibilité de Dawid, les enjeux sont passés au crible : difficulté du retour à une vie normale pour les survivants, détresse de ceux qui attendent au Lutetia d’improbables nouvelles de leurs proches disparus, réactions contrastées des Parisiens, flou du rôle de certains pendant la guerre. Une belle façon d’aborder le sujet, notamment pour un public adolescent.
Article publié dans le mag ZOO n°106 Septembre-Octobre 2025