Ravivant un spleen baudelairien sauvage, Mes héros ont toujours été des junkies suit le parcours d’une jeune droguée qui ne cherche pas la rédemption. Un roman graphique noir à la mélancolie teintée de romantisme.
Ellie est une belle blonde misanthrope et orpheline de deux parents braqueurs, dont une mère toxico. Au début de l’ouvrage, elle se balade sur la plage en pensant à une chanson, Stevie Smith, dont le couplet « Je suis déjà plus loin que je ne le crois. Et je ne nage plus, je me noie. » la touche particulièrement. On fait alors un bond dans le passé : il n’y a pas longtemps, elle était en cure de désintoxication. Sans aucune intention d’arrêter mais pour mettre sur pied un dessein bien plus macabre. Admiratrice des camés magnifiques tels que Bowie ou Sartre, elle séduit Skip et va vivre avec lui un amour à la Bonnie and Clyde d’une tristesse absolue, pour le mener à une fin implacable.
De nombreux thèmes sont abordés dans ce roman graphique, dont le pouvoir de séduction et de manipulation, l’addiction, les problèmes familiaux, l’individualisme exacerbé... Fille toxique, Ellie l’est pour elle et pour les autres, perdue dans une dynamique malsaine qui entraîne dans sa chute un repenti. On plonge dans une fresque sociale d’une étrange noirceur, même si le personnage secondaire aurait mérité d’être plus étoffé.
En dehors des flash-back en noir et blanc, la colorisation semble avoir été apposée avec du coton : des espaces blancs aux bords effilés parsèment les cases et les couleurs pastel, très douces, confèrent à l’ouvrage un côte psychédélique. Elles viennent mettre une touche d’espoir sur la triste histoire contée au lecteur.
Ce roman graphique puissant pourrait bien rendre le lecteur... accro.