King Spawn - T1

Né en 1992 avec les débuts d’Image Comics, Spawn fait partie des rares personnages créés alors et toujours en activité. Une réussite à mettre au crédit de son concepteur, Todd McFarlane, qui a su tenir son cap et fidéliser sa communauté de lecteurs. King Spawn traduit la volonté de l’artiste de déployer son univers plus largement. C’est une bonne occasion pour ceux qui avaient picoré les livres Spawn de se mettre à suivre sérieusement le personnage.

Une toile se tend, dans l’ombre d’internet. Une toile de croyants se tisse, convaincus que le Hellspawn a un rôle majeur à jouer dans la guerre entre le ciel et l’enfer. Un enfer au trône vide, qui doit retrouver son roi. Eux savent que c’est inéluctable et nécessaire. Alors Spawn devra être guidé. Al Simmons doit devenir le King Spawn. Pour quel objectif final ?

Retours aux origines

Non, Todd McFarlane et Sean Lewis ne réécrivent pas les origines du personnage, avec King Spawn. Mais ils utilisent tous les éléments des premiers épisodes, la matière originale, pour composer un tout nouveau récit : Terry Fitzgerald, Billy Kincaid, Violator, Cogliostro… Et même d’autres créations plus modernes, comme Cy-Gor, Gunslinger Spawn ou Miss Spawn. Aucun de ces personnages ne vous parlent ? Passez votre chemin. Vous en connaissez quelques-uns ? Alors King Spawn mérite de faire l’effort. Il y a beaucoup de concepts à intégrer, mais ils sont globalement bien expliqués par le duo MCFarlane/Lewis. Comme dans toute série de long cours, il faut accepter de ne pas tout maîtriser quand on prend en cours de route. Mais King Spawn lance une toute nouvelle intrigue, ouvre vers de nouvelles créations. Alors c’est le bon moment pour s’y remettre.

McFarlane revient aux fondamentaux de son personnage, compose quelque chose de nouveau avec. On peut saluer cette volonté de se rendre accessible aux lecteurs, trente années après le premier épisode.

Et est-ce que ça fonction ?

Ok, McFarlane fait le nécessaire pour récupérer des lecteurs. Mais est-ce que le lecteur a envie de rester ? Plutôt oui. Les deux antagonistes de ce recueil apportent chacun une ambiance différente, des enjeux différents. Il y en a un que l’on connaît et que l’on prend plaisir à voir mis à terre par le héros. Et il y a celui que l’on ne connaît pas et dont la révélation marque les esprits.

Sean Lewis s’appuie sur les tendances mondiales du moment, le complotisme, la radicalisation, pour nourrir une intrigue tout à fait malaisante.

King Spawn T.1
© Delcourt, 2022

Choisir la bonne intention graphique

Pendant longtemps, le succès de Spawn s’incarna graphiquement en la personne de Greg Capullo. Un artiste qui, depuis, s’est illustré sur la série principale Batman. Cela traduit bien l’enjeu qui est celui du dessin, pour la série d’Image Comics : en permanence, elle doit composer entre les aspects horrifiques et super-héroïques. Entre le fait d’être une série « indépendante », et celui d’être la plus mainstream dans ses intentions.
En faisant appel à Javi Fernandez, McFarlane semble adopter un point médian. L’artiste se montre tout à fait à l’aise dans les scènes d’action, avec un trait lisible et fin. Mais il y a une noirceur dans ses fonds de case qui répon biend aux productions indépendantes du moment. Le travail de l’encreur Adelso Corona et celui du coloriste Peter Steigerwald apportent une vraie cohérence. On pourrait penser qu’un seul artiste est à l’œuvre. Le style généré par ses six mains est juste le bon pour servir les intentions scénaristiques.

 Trente ans plus tard, Spawn, c’est toujours un mélange particulier entre horreur et super-héroïsme. Ce King Spawn tome 1 renouvelle le pacte avec les lecteurs et peut permettre de fidéliser une nouvelle communauté. Pari réussi de la part du plus médiatique des fondateurs d’Image Comics.