Il était temps qu’on puisse lire de Fujisawa autre chose que Great Teacher Onizuka (GTO) et sa prequel Young GTO : voilà enfin Tokkô, qui montre Tôru Fujisawa se frotter à la BD de genre, avec cette histoire de brigade spéciale anti- zombies œuvrant en 2011 dans une ville de Tokyo livrée à des massacres de masse… Anthropophagie et grands coups de sabre au programme !
Donc Tokyo 2011, on suit une jeune recrue de la police intégrant une unité spéciale chargée de lutter contre la vague de meurtres de masse qui s’est abattue sur la ville depuis quelques années — c’est la Tokki. Et au sein de la Tokki, il existe une sous-section appelée Tokkô de quelques agents se baladant avec d’énormes épées — mais on ne sait pas trop quel est son rôle. Ce qui est sûr, c’est que notre héros Shindô, dont les parents ont été massacrés avec 400 autres il y a quelques années, rêve régulièrement d’une des inspectrices de la Tokkô. Quand il est amené à ouvrir le feu sur une bande de tueurs armés de leurs seuls poings mais dotés de visages parasites qui leur poussent sur le torse, Shindô voit les autres flics se faire déchirer au sens propre, alors que ses balles ne font rien aux zombies, et c’est la Tokkô qui leur sauve la mise in extremis. Mais tous voient bien que Shindô n’a pas été blessé alors qu’il était au cœur du combat — souvenez-vous, Alien, quand Ripley est épargnée parce qu’elle a quelque chose en elle…
Tokkô © Tôru Fujizawa / Kodansha Ltd. / Pika Editions
Bouffeurs de chair humaine
Dans ce premier tome, Fujisawa installe tous les éléments du récit avec la virtuosité de l’habitué des séries longues, se préparant une bonne réserve de cartouches scénaristiques pour tenir quelques dizaines de volumes. Des ombres planent au-dessus de ces combats entre flics de l’étrange et zombies invulnérables aux balles, une galerie de personnages secondaires issus d’une bible bien préparée entoure Shindô, et une trame générale pointe déjà — quelque chose tournant autour du retour d’un très très gros monstre sur Terre.
Et puis Fujisawa dans l’horreur, c’est stylistiquement bien vu. On se souvient des déformations moches du visage des protagonistes de GTO mis dans des situations de ridicule intense : Tokkô récupère cette expertise de la laideur drôle en remplaçant le ridicule par la terreur, et les profs obsédés par des bouffeurs de chair humaine… Tout cela étant vu principalement à travers le regard de très jeunes inspecteurs de police frais émoulus de l’école, Tokkô lorgne sur le même public d’ados et adulescents que GTO, et ne cherche surtout pas à déborder sur la BD adulte : tant mieux, comme Shaun of the Dead elle apporte une fraîcheur bien agréable au genre «zombie» qui commence à être bien rebattu !