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Une maison fragile sur ses fondations

Malgré des décors splendides et le joli portrait d’une enfant et d’une adolescente, La Maison des égarées peine à décider dans quel genre s’installer.

Produit pour commémorer le dixième anniversaire du séisme tragique qui frappa le Japon en 2011 près de la côte Pacifique de Tôhuku, La Maison des égarées entend construire un commentaire sur l’état présent du pays et de ses habitants. Lequel ? Peut-être tourne-t-il autour d’un besoin de laisser une plus grande place aux femmes…

Quelques semaines après le tremblement de terre à l’origine de la catastrophe nucléaire de Fukushima, Yui, une adolescente fugueuse, croise la route de Hiyori, une orpheline de 8 ans dans le refuge d’une ville côtière dévastée. Elles sont immédiatement recueillies par Kiwa, une senior mystérieuse et souriante qui les déclare auprès des autorités comme étant ses petites-filles. Elle les conduit alors dans une maison enchantée à flanc de falaise qui subvient en tous points à leurs besoins, tant qu’on l’entretient…

La maison des égarées

La maison des égarées © Les Films du Préau, 2023

Girl (soft) power

D’aucuns pourraient croire que l’on a ici affaire à une antithèse de Shining de Stephen King même si l’origine est beaucoup plus locale et ancestrale. Si La Maison des égarées s’avère être une adaptation du roman bestseller au Japon, Misaki no Mayoiga de Sachiko Kashiwaba, l’autrice a puisé son inspiration dans les traditions locales de la ville de Tono, surnommée la Cité du Folklore. Lesdites traditions ont déjà été maintes fois explorées dans l’animation japonaise comme celle, centrale ici, des Kappa de l’eau. Ils étaient déjà présents dans l’attachant Un été avec Coo de Keiichi Hara.

C’est peut-être d’ailleurs dans sa manière d’administrer un coup de jeune au folklore éternel régional, à travers ce trio, que La Maison des égarées imprime ses passages parmi les plus intéressants. Au milieu de cette chatoyante symphonie pastorale, il dépeint une société en reconstruction dominée par une sororité et un matriarcat en action, en contrepoint total avec la figure paternelle toxique et menaçante de Yui, régulièrement convoquée.

La maison des égarées

La maison des égarées © Les Films du Préau, 2023

Tonalité hésitante

Seulement, La Maison des égarées négocie mal son virage vers l’acte final avec une bascule précipitée entraînant le passage obligé d’une entité maléfique à annihiler pour retrouver l’équilibre. Comme si Shinya Kawatsura avait eu peur d’ennuyer son auditoire avec ses tranches de vie intimistes, pourtant fort agréables, et céder aux sirènes du spectaculaire. Un comble alors qu’il avait dans ses rangs la scénariste chevronnée Reiko Yoshida qui n’a pas son pareil pour sonder les maux rongeant la société japonaise contemporaine, comme c’était déjà le cas dans A Silent Voice,
à la manière d’un tremblement de terre souterrain.

Article publié dans ZOO Manga N°8 Mai-Juin 2023

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Fantastique

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