Chaque vendredi, on découvre ensemble une planche de l'immense collection de la Cité de la bande dessinée et de l'image d'Angoulême qui propose jusqu'en août 2026 une exposition fascinante et sans cesse renouvelée : Trésors des Collections. Dans la section aventure, découvrez la planche #22 : Tarzan par Harold Foster.

Le mot du commissaire de l'exposition, Jean-Pierre Mercier
Pour beaucoup, le 7 janvier 1929 signe l’avènement de la bande dessinée d’aventure aux Etats-Unis. C’est ce jour là en effet que paraissent deux comic strips qui vont contribuer à l’établissement du genre : la série de science-fiction Buck Rogers de Nowlan et Calkins et Tarzan de Harold Foster, adapté des romans d’aventure d’Edgar Rice Burroughs, parus pour la première fois aux États-Unis en 1912 dans le magazine All-Story Magazine. Foster dessine les comic strips de la série publiés de janvier à mars 1929, puis les sunday pages de 1931 à 1937.
Les compositions innovantes de Foster (plongées, contre-plongées, contre-jours) et son dessin classique, précis et plein de majesté -fixant à jamais l’image du seigneur de la jungle-, assurent à Tarzan un succès immédiat.
En 1936, débauché par le magnat de la presse William Randolph Hearst, Foster créé Prince Valiant, abandonnant Tarzan à un dessinateur débutant mais prometteur : Burne Hogarth.
Le mot du chroniqueur de ZOO, par Frédéric Grivaud
La Sunday page qui est présentée ici date du 10 septembre 1933, plus ou moins au milieu de la longue période pendant laquelle Hal Foster prend en main la série. Si l’artiste va ensuite briller incontestablement sur Prince Valiant, son travail sur Tarzan lui a permis de peaufiner son approche graphique, d'améliorer ses cadrages et d'imposer un style classique mais moderne pour l'époque, à un univers extrêmement codifié qui fait les beaux jours des pulps depuis ses débuts en 1912, de la plume de son créateur Edgar Rice Burroughs.
Cette planche est au centre d’une longue épopée se déroulant en Égypte. Tarzan vient de porter secours à la jeune Amnis, qui était poursuivie par les sbires de la reine Nikotris. Le jeune pharaon Tutamken a pris la décision d'aider le héros et ses compagnons face aux dangers que représente sa sœur, éperdument amoureuse du roi de la jungle, voyant en la jeune esclave une concurrente à éliminer. Afin de protéger Amnis et Von Harben, il les confie alors à un berger et ramène Tarzan avec lui.
Entre-temps, au palais, les bruits courent que « le monstre » s'est libéré de sa prison, que la reine est menacée, une supposition qui se confirme à la dernière case quand l'ombre de la créature vient s'immiscer au-dessus de Nikotris, lançant ainsi la suite des péripéties du héros…
La planche est coupée en deux, pour bien séparer les deux sous-intrigues qui, même si elles se correspondent pratiquement en termes de construction, se déroulent néanmoins en parallèle l’une de l’autre. Toutefois, Foster marque ainsi la transition entre les deux séquences. D’une part, la course-poursuite entre les gardes de la reine et la jeune Amnis protégée par Tarzan, et le nouvel arc qui voit Nikotris enlevée par la créature. L’artiste amène une sorte de respiration dans son récit dans la première partie et nous plonge immédiatement dans une tension palpable dans la seconde. C’est un code narratif assez classique qui fonctionne parfaitement.
Foster reste avant tout un illustrateur qui commente le contenu des images plutôt que de faire exprimer ses personnages. Il utilisera le même système dans Prince Valiant, tout en incluant dans les textes des bribes de dialogues, en voix off. Ce qui donne aujourd’hui un petit côté daté à cette approche, mais qui permet à l’auteur de se concentrer sur la mise en scène de ses cases, de la gestuelle qui en disent souvent bien plus que les mots.
Foster reste encore aujourd’hui l’un des grands maîtres de la bande dessinée et chacune de ses planches est un véritable enseignement.

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