ZOO

Pagnol, l'éternel insatisfait

En s’attelant à mettre en scène la vie tourmentée de Marcel Pagnol, Sylvain Chomet signe son retour vers l’animation grand luxe. Si Marcel et Monsieur Pagnol est visuellement éblouissant, sa conduite du récit manque parfois d’audace.

À la fin des années 50, Marcel Pagnol se morfond dans sa demeure parisienne : Fabien, sa dernière pièce de théâtre, est un four. Âgé de 62 ans, Marcel se sent vieux et dépassé, perdu qu’il est dans son brouillard mélancolique intérieur… à tel point qu’il en oublie d’honorer une commande anodine : un texte autobiographique sur son enfance dans l’arrière-pays marseillais. Le coursier s’annonce en bas de chez lui. Dos au mur, Marcel doit noircir des pages au plus vite en réveillant l’enfant qu’il a été. Lui qui est obsédé par le mouvement perpétuel, le voilà en train de remonter le temps.

Extrait de Marcel et Monsieur Pagnol, sorti en salles le 15 octobre.

Extrait de Marcel et Monsieur Pagnol, sorti en salles le 15 octobre. © 2025

Ligne claire et classicisme

On l’aura compris : Marcel est sur le point d’écrire , le plus grand succès de sa carrière. Ce point de départ sert idéalement de prétexte à Sylvain Chomet pour articuler Marcel et Monsieur Pagnol autour d’un grand flashback. L’intention didactique est évidente (d’autant que le scénario a été bordé par les héritiers) et les reproches sur le manque d’audace et d’aspérités de l’ensemble sont plus que légitimes. Et bien que Sylvain Chomet n’ait jamais livré un film aussi bavard, sa patte fait encore merveille.


Sans doute parce que le goût du verbe et des planches était dans l’ADN de Pagnol, Chomet a jugé bon de déployer une mise en scène moins virevoltante et plus en phase avec une scénographie théâtrale. Cela ne l’empêche aucunement de produire des compositions ahurissantes de minutie, à même de faire revivre une splendide imagerie pittoresque qu’il affectionne tant. Surtout, Marcel et Monsieur Pagnol parvient en creux à raconter tout un pan mal connu du cinéma français, du passage au parlant au protectionnisme de la Libération en passant par la résistance passive sous l’Occupation. Et, en son sein, la figure de Marcel Pagnol, personnage complexe et éternel insatisfait qui, en dépit d’un ton parfois hagiographique, continue de nous émouvoir avec ses petites joies et ses inoubliables chagrins. À montrer aux enfants.

cinéma

Littérature

Mémoire

ZOO107

Haut de page

Commentez

1200 caractères restants