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Mark Waid face à un monde perturbé

Le festival Quai des Bulles 2019 accueille le scénariste américain Mark Waid. Ce professionnel du comic book vient en France présenter sa nouvelle série, Ignited. Ce fer de lance de H1, le nouveau label américain des Humanoïdes Associés, en sera aussi la première sortie avec le one-shot Meyer. Auteur et directeur du développement du label, Mark Waid nous a offert un tour dans son nouvel univers.

Vous êtes directeur du développement créatif pour H1, qu’est-ce que cette fonction ?

Mark Waid : J’ai sensiblement tout fait dans le monde des comics en trente-cinq ans. J’ai été éditeur, vendeur, scénariste, lettreur... Cette palette a intéressé Fabrice Sapolsky, qui m’a proposé de rejoindre H1, la structure éditoriale dédiée aux comics des Humanoïdes.

Je suis chargé d’étudier tout ce qui relève de l’écriture. John Cassaday occupe la même position sur un plan artistique. On donne tous deux notre avis puis nous décidons avec Fabrice Sapolsky de ce qui sera publié.

Comment l’univers d’Ignited a-t-il été bâti ?

Les trois architectes de l’univers, Yannick Paquette, Kwanza Osajefyo et Carla Speed-McNeil ont développé la structure d’un univers partagé. Trois séries, trois groupes de personnages qui vivent dans un monde en crise. Une sorte d’énergie venue de notre inconscient collectif s’y manifeste en dotant certains individus de capacités particulières afin qu’ils essaient de régler ces problèmes.


Vous vous définissez souvent comme optimiste. Ignited est-elle votre réponse au monde actuel ?

Je pense que oui. L’Art a la responsabilité de donner à voir ce qu’est notre monde. Je suis tout sauf cynique. Je m’autorise donc à écrire et à superviser ce genre d’histoires, qui sont très positives dans une époque très stressante. Il ne s’agit pas simplement de divertir le lecteur, mais aussi de prendre ses responsabilités.

Ignited traite de meurtres de masse, de contrôle des armes. N’était-ce pas risqué de lancer un nouvel éditeur sur des sujets si sensibles ?

C’était risqué et volontaire. Les seuls comics dont on se souvienne sont ceux qui ont été risqués, qui n’avaient pas peur de dire des choses. Dans Ignited, un groupe de jeunes est confronté à un meurtre de masse dans son lycée, et développe des pouvoirs lui permettant de répondre à ce système violent. Il n’y a pas de super-vilain à frapper. Il faut juste gérer des parents dingues ou de fichus politiciens. Je suis pour le contrôle des armes, certains de ces gamins le sont aussi, mais pas tous. J’ai essayé de développer différents points de vue, sinon, cela aurait été trop ennuyeux à la lecture.

Illustré par Philippe Briones, Ignited donne à voir la violence de ces meurtres de masse dans des cases monochromes rouge sang.

Je ne voudrais pas que le lecteur se méprenne : nous ne voulions pas exploiter l’horreur de ces actes, mais il n’aurait pas été honnête de traiter d’un tel problème sans montrer l’épreuve par laquelle passent ces jeunes. Nous traitons des conséquences de ces moments et avançons sur une ligne très fine. Phil est parvenu à un juste équilibre dans la représentation visuelle. Très bon dessinateur, il apporte beaucoup aux personnages et les rend « vrais » tout en comprenant ce qu’on attend de la narration.

Comment travaillez-vous avec votre co-scénariste ? Comptez-vous lui laisser la main à terme ?

Nous avions déjà une trame générale pour les quatre premiers épisodes. À partir de là, Kwanza et moi avons beaucoup échangé par internet pour chaque scénario. Désormais, Kwanza propose des idées dont on discute et j’écris moi-même le scénario final. Mais j’ai à cœur que sa voix soit aussi présente dans les histoires que la mienne. Je suis très attaché à cette série, alors je reste à la barre et nous continuons à travailler en équipe.


Article publié dans le magazine Zoo n°73 (Septembre-Octobre)

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