Il était une fois… Nul besoin de résumer le plus célèbre des contes de Charles Perrault tant celui-ci a fait l’objet d’adaptations sous toutes les formes artistiques possibles et imaginables. Est-ce à dire que cette bande dessinée serait celle de trop ? Ce serait totalement sous-estimer le talent de Danijel Zezelj, tant sa création s’affirme avec une force graphique exceptionnelle.
Depuis 1999 avec Rêve de béton, les éditions Mosquito n’ont cessé de publier avec une belle régularité (et autant d’obstination !) les albums de Danijel Zezelj qui est devenu ainsi, au même titre que Sergio Toppi, une des figures emblématiques de leur catalogue.
Affirmer que chez lui l’image, plutôt que le texte ou les dialogues, est l’élément primordial de sa narration est un euphémisme. Avec Industriel puis Babylone, il s’est lancé dans de longs récits muets, succession de vignettes qu’il appartient au lecteur de déchiffrer pour suivre l’intrigue. Maître absolu du noir et blanc et du clair obscur, ses coups de pinceaux vigoureux et précis ne dépeignent jamais un monde très joyeux.
En adaptant le Petit Chaperon rouge, il se surpasse et signe un chef-d’œuvre d’expressivité et de poésie. Rarement la nature n’aura été aussi magnifiée avec ses forêts de sapins, ses plans d’eau, ses marécages et ses montagnes sous des cieux vaguement tourmentés qui confèrent à son adaptation une ambiance parfois sereine et apaisée, parfois inquiétante voire oppressante.
Il serait stupide de croire qu’un album sans texte ne mérite peut-être pas l’achat, car sitôt parcouru, sitôt rangé. Mais Chaperon rouge exerce sur un œil attentif une véritable attraction qui vous invite à refaire plusieurs fois le parcours et, à chaque reprise, une case, une vignette a priori abstraite, un détail qui vous aura échappé, viendra enrichir votre lecture. Car, même sans le moindre texte, c’est bien de lecture qu’il s’agit.
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