D’habitude quand on apprend qu’on est atteint de la maladie de Crohn, c’est juste le début d’une longue série de galères. Mais quand ça arrive à Pozla, il fait face avec le dessin. Il en ressort avec certes quelques cm d’intestin en moins mais aussi avec un Carnet de santé foireuse magistral et étourdissant.
Alors que jusque là, il vivotait accoutumés aux violents maux de ventre chroniques, Pozla arrive enfin à mettre un diagnostic sur cette douleur : la maladie de Crohn. En bonus avec cette affection chronique, chirurgie et traitements lourds. Armé de son carnet de dessin et de son autodérision, cet auteur va consigner des mois de souffrance pour en faire, 2 ans plus tard, une BD monumentale, mêlant vulgarisation médicale, humour noir et graphisme époustouflant.
Si le pari de mettre sa maladie en scène sur 368 pages était un « Everest » comme l’avait souligné Manu Larcenet, Pozla est un alpiniste hors pair. Sans pathos déplacé, il narre sa descente dans l’enfer médical avec un ton et un trait qui vise juste. Familier ou non de la maladie, on rit du collège de médecin devenu un rassemblement de moines encapuchonnés, on enrage devant l’indifférence à la douleur de certains et on pleure des larmes d’émotion devant les parenthèses de répit.
Que ce soit dans les pages d’illustrations en noir et blanc, dans les amas de boyaux, les explosions de couleur qui symbolisent le mouvement ou la douleur, Pozla bluffe. Du côté gros nez aux croquis faits sur l’instant, Pozla sait narrer avec légèreté un moment plus que foireux de son existence. Il s’est payé le luxe de conjuguer poésie et humour pour offrir un carnet dense et marquant.
Ce témoignage aussi esthétique que bouleversant est à lire de toute urgence.