Récit d’anticipation maîtrisé et haletant, Sérum nous narre la vie morne et douloureuse de Kader dans un Paris sombre et lugubre. Travail réussi pour le duo Cyril Pedrosa et Nicolas Gaignard qui signe une bande dessinée immersive.
En 2050 à Paris, le nouveau régime isolationniste mis en place n’a apaisé ni les tensions ni l’atmosphère étouffante de la capitale où apparaissent de plus en plus de protestations face aux décisions gouvernementales. Kader travaille dans un parc éolien, après être passé par la case prison où il a reçu l’injection d’un sérum qui le condamne à dire toute la vérité aux gens qu’il croise. Cette particularité l’isole et fait de sa vie un enfer. Un jour, il s’aperçoit qu’il est de nouveau surveillé par les forces de l’ordre...

Cette dystopie réglée au millimètre nous dépeint un univers proche et lointain à la fois. Urbanisée à l’extrême et quadrillée par un gouvernement autoritaire, Paris semble vidée de son âme. Très succincts, les dialogues de Cyril Pedrosa vont à l’essentiel et dévoilent au compte-goutte les éléments de compréhension essentiels. Approche classique du récit d’anticipation, le rythme néanmoins haletant convainc et amène une lecture de qualité qui fait honneur aux autres ouvrages du genre.
Les couleurs ternes, l’inexpressivité générale des personnages et l’environnement lugubre coïncident parfaitement avec le ton de l’histoire et la noirceur du propos. L’alternance réussie des plans et la rigueur donnée au travail du mouvement appuient cet environnement hostile, abritant une tension croissante et palpable par le lecteur. Le trait soutenu et intriguant de Nicolas Gaignard se prête merveilleusement à l’univers de science-fiction pessimiste dépeint dans Sérum.
Un roman graphique bien mené qui nous fait espérer une nouvelle collaboration entre ces deux auteurs talentueux !