Prosperi Buri s'est inspiré des histoires que lui a raconté sa famille de l'île de Groix, au large de Lorient, en Bretagne. Qu'elles soient directement issues de l'imaginaire collectif ou bien fondées, l'auteur y apporte une touche déjantée et marrante, dans le texte comme dans le dessin. Sans pour autant casser trois pattes à un canard.
L'île de Groix, ses marins, ses veuves, ses bouses de vaches qui sèchent sur les murs et ses histoires bretonnes incroyables qui se racontent tard la nuit chez Ty Beudeff, un troquet connu de tous les marins du monde. C'est ce que raconte avec humour et décalage Prosperi Buri dans un petit album carré plein de promesses. Entre les mers du globe, Groix est un phare dans la tempête. « Qui voit Groix, voit sa croix » dit-on en Bretagne. Avec une variante : « Qui voit Groix perd son foie ». Tout est dit.
Les anecdotes et petites histoires directement inspirées de l'île ne manquent pas de saveur. D'autres tombent malheureusement à l'eau et fond un plouf à réveiller un pêcheur qui cuve, comme ce délire sur une montgolfière qui emporte le simplet de l'île... Si ce livre a le mérite de rendre hommage aux Groisillonnes et Groisillons, tout en mettant au passage un petit taquet au journaliste Roger Gicquel, on pouvait en attendre bien plus vu la fantastique matière de départ.
Même constat côté dessin. La patte alternative au noir et blanc underground de l'auteur apporte son lot de déconnade, sans pour autant aller au bout d'une BD totalement décalée qu'on aurait pu attendre sur le papier. Petit livre, petites cases, ce livre permet de passer un bon petit moment sans pour autant devenir une bande dessinée absolument incontournable.
Sein, Molène, Ouessant... Les îles bretonnes ne manquent pas d'inspirer les auteurs. Chacun sa croix, chacun sa Groix, gare à votre foie.