Pigalle 1950, un polar atypique, noir à souhait, est signé par Pierre Christin qui forme avec Jean-Michel Arroyo au dessin un duo détonant. Leurs talents réciproques sont venus s’associer en toute simplicité.
1950, un jeune Aveyronnais quitte son Aubrac natal, direction Paris pour travailler chez un bougnat de la famille. Antoine livre du charbon Antoine à la Lune Bleue, un cabaret tenu par le Beau Beb, un malfrat haut de gamme qui va prendre le gamin sous son aile. Mais pourquoi faire revivre le Paris des années 50 ? Pierre Christin raconte qu’il avait demandé à Arroyo le thème qui le tentait : « Il m’a répondu qu’il aimait les ambiances années 50, Pigalle. J’avoue que ce n’était pas mon quartier de Paris favori. Je le connais mal. Le fait qu’on en parle m’a tenté d’aller y traîner mes guêtres pour y écrire cette histoire. »
Christin a fait du noir et blanc à la Melville, style film avec Gabin ou Blier. « Je voulais retrouver atmosphère et argot de l’époque du petit Parigot que je suis. Simonin, Blondin, je continue à me servir de ce vocabulaire » poursuit Christin. « Arroyo a travaillé d’une façon extraordinaire. Ses dessins préparatoires n’étaient plus du tout dans son style aviateur et on a décidé de faire cet album ensemble. »

Pigalle, 1950
© Dupuis, 2022
Plus dure sera la chute
Au programme à Pigalle, ce sera la lutte sanglante des gangs. Les Corses débarquent dans la capitale, les moeurs évoluent dans le grand banditisme. Antoine va certes monter en grade, en puissance, mais être pris au piège. Un sentimental, un fidèle comme le dit Jean-Michel Arroyo : « C’est intimiste. Antoine, homme à tout faire est pris dans une affaire qui va le dépasser et avoir la belle Olga, chanteuse à succès, comme compagne. Le pitch, c’est son destin que synthétisait le premier titre de l’album, Le Funiculaire redescend toujours, devenu Pigalle 1950. Plus dure sera la chute. »
Après Buck Danny Classic, Arroyo d’un trait à la rigueur soutenue montre sa vraie dimension. Toujours en mouvement sans perdre pourtant son romantisme, il a su se mettre au service de l’écriture de l’un des plus grands maîtres du scénario. On est à Pigalle avec un souci poussé de la reconstitution d’une époque, d’un Paris qui allait bientôt disparaître avec en toile de fond la guerre d’Algérie, DS 19 et Traction avant.
Embrouille et vengeance
Il y a une ambiance authentique dans ce Pigalle écrit par un Pierre Christin à la fois inspiré et pertinent chroniqueur d’un polar où la vengeance, l’embrouille est maîtresse du jeu. Arroyo lui donne à merveille la réplique, s’impose et donne vie à un monde pour lequel on peut avoir parfois une certaine nostalgie.
Pour leur prochaine collaboration, L’Île des riches, qui paraîtra aussi chez Aire Libre, Christin et Arroyo en couleur directe, passeront à une aventure post-apocalyptique.
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