Convoqué par un juge pour s’expliquer sur son passé dans la Waffen SS, soixante ans après les faits, Marcel Grob finit par s’expliquer et se replonger dans les événements qui l’ont conduit à participer, malgré lui, aux pires atrocités. Philippe Collin se penche sur le passé de son grand-oncle alsacien et, pour sa première incursion dans la BD, signe avec le concours artistique avisé de Sébastien Goethals un album d’une rare puissance.
Face à ce juge qui regarde l’Histoire avec un œil hors du contexte et des contingences de l’époque, Marcel Grob aura du mal à justifier son parcours. Comme plus de 100 000 Alsaciens et 30 000 Mosellans, ainsi qu’en atteste le très instructif dossier de Christian Ingrao en fin d’album, Marcel Grob n’a pas eu le choix, fin juin 1944, que de se conformer aux ordres de conscription du Reich allemand, car toute désertion entraînait la déportation de toute la famille.
À peine sorti de l’adolescence, le voilà revêtu de l’uniforme militaire et en route pour l’Italie du Nord pour aller éradiquer la région de ses résistants actifs. Entre-temps il assistera à l’exécution, sans autre forme de procès, de deux de ses camarades déserteurs. Puis, survint l’innommable : le massacre de tout un village, Marzabotto, où périrent plus de 700 civils, hommes, femmes et enfants.
Fort de son album précédent, Sébastien Goethals se révèle d’emblée à la hauteur de la tâche qu’implique ce roman graphique de 178 pages. Son ascendance dans le médium par rapport à son scénariste, profane en la matière, a été déterminante dans le choix des options graphiques et dans la façon de traiter ce poignant récit notamment avec l’emploi des lavis et de leurs tons dominants selon les séquences.
La couverture très réussie avec un seul soldat qui regarde en arrière constitue une belle invitation à venir partager avec lui son dramatique parcours.
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