À l’instar de celui du personnage principal, notre flair ne nous trompe pas : Demon Slayer, chez Panini, mérite un coup d’œil intrigué de ceux qui ont laissé passer sa précédente incarnation.
© KIMETSU NO YAIBA 2016
by Koyoharu Gotouge/SHUEISHA Inc.
Sa précédente incarnation ? Le début de la série fut en effet publié, déjà aux éditions Panini, mi 2017 sous le nom de Rôdeurs de la nuit avant de disparaitre des radars faute de ventes satisfaisantes. La saga est pourtant l’un des nombreux cartons du fameux Shonen Jump. Cet apparent désintérêt de l’éditeur français, qui ne semblait plus décidé à poursuivre son impression, avait provoqué quelques remous digitaux, notamment avec l’apparition du mot-dièse passionné #sauvonslesrodeursdelanuit. Les lecteurs avaient pour l’occasion exprimé, photos d’achat à l’appui, leur envie tenace de voir la suite paraître.
Un an plus tard, les éditions Panini prouvent, contrairement à leur sulfureuse réputation, qu’elles étaient à l’écoute en transformant totalement au passage leur façon d’appréhender la licence. Exit l’ancien titre, assez divergent de celui d’origine, au profit du titre américain Demon Slayer, plus brut de décoffrage. Le lien avec l’animé éponyme devenu dès lors évident, l’éditeur pourra ainsi compter sur une transfusion de public. Pour appâter les lecteurs en boutique, la maison d’édition frappe aussi un grand coup en proposant les deux premiers tomes au prix d’un seul en septembre puis en mitraillant les suivants de sorte à publier les tomes 3, 4 et 5 avant même les fêtes de Noël.
Des conséquences du carnage
Tanjiro est un jeune garçon à l’odorat puissant et à la tête dure comme un roc. Pour nourrir sa famille, il vend jovialement du charbon dans un Japon médiéval qui craint des monstres de légende dévoreurs d’humains. Mauvaise surprise, ces monstres existent bel et bien, ce que découvre Tanjiro en tombant sur sa famille décimée. Sa jeune sœur Nezuko, seulement mordue, devra lutter contre sa transformation en ogresse, ou du moins tâcher de contrebalancer ses nouveaux penchants violents. Afin de trouver un remède à son mal, son frangin se fraiera pendant ce temps un chemin à travers l’organisation des chasseurs de démons qui traquent et détruisent ces créatures malfaisantes, bien souvent au prix de leur vie. Évidemment, le duo sera confronté très rapidement à une palanquée d’ennemis plus retors et puissants les uns que les autres, puis épaulé par un casting aussi farfelu que ce que requiert le genre.
Souple et solide à la fois
Si le synopsis s’avère des plus simples, son exécution se révèle très réussie. Au-delà d’une patine visuelle initialement un peu générique, la série affirme un certain nombre de choix, notamment celui de ne pas minimiser l’horreur cruelle des affrontements, qui renforcent lentement et efficacement son ambiance. Tout comme Black Clover, chez Kana, qui avait mis un certain temps à trouver son identité, Demon Slayer se construit après chaque chapitre jusqu’à prendre un rythme de croisière assez groovy. Son récit fluide et rythmé lui permet d’insérer subrepticement des personnages auxquels on s’attache totalement par surprise avant de multiplier la formule connue en jeux de rôle sous la mention « porte-monstre-trésor », enchaînant nombre de créatures aux pouvoirs fulgurants dans un flux entraînant.
© KIMETSU NO YAIBA 2016 by Koyoharu Gotouge/SHUEISHA Inc.
L’effort éditorial de Panini est palpable mais quid de l’envie des lecteurs méfiants ? Bien que certains soient déjà totalement acquis à la cause, la série prendra-t-elle l’ampleur commerciale que son succès japonais laissait augurer ? Il ne vous coûtera quasiment rien de céder à la curiosité.
Article publié dans le magazine Zoo n°73 (Septembre-Octobre)