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Les nuits folles de Fool Night sont-elles sombres, toujours plus sombres ?

Fool Night commençait, en avril 2022, par une dystopie. Prometteur dans un genre assez inclassable, Kasumi Yasuda n’a cessé de faire des expériences de styles… Au point de disperser ses trames scénaristiques.

Depuis 100 ans, le monde est couvert d’un épais nuage tuant toute végétation. Pour survivre, l’humanité développe la transfloraison. Une technique qui consiste à implanter une graine dans le corps d’un mourant. La plante se nourrit alors de l’âme humaine. Durant deux ans, les transflorés vivent sur une allocation de 78 000 € avant de devenir des « sanctiflores ».

Toshiro, asphyxié par la pauvreté, décide d’en finir. Il s’intoxique pour se faire transflorer. Mais à peine obtient-il les 78 000 € qu’il se les fait voler. La malchance s’acharne sur lui jusqu’à ce qu’une amie, Yomiko, chirurgienne à l’institut de trans­floraison découvre que Toshiro est capable de communiquer avec les sanctiflores. C’est inédit.

Les nuits folles de Fool Night sont-elles sombres, toujours plus sombres ?

© FOOL NIGHT © 2021 Kasumi YASUDA / SHOGAKUKAN

Le carrousel des genres

Dès les premières pages, l’univers sombre et lourd annonce la couleur. Et c’est bien la seule constante de la série. Car, si elle commence tel un drame à travers les péripéties de Toshiro, elle se poursuit comme un policier, lorsqu’il tente de retrouver des sanctiflores pour l’institut. Le genre change à nouveau pour du thriller, lorsqu’un serial killer transfloré attaque des civils. Puis ça change encore lorsque Fool Night prend une dimension franchement politique.

« Kasumi Yasuda a un véritable talent de la mise en scène »

Sur les 5 tomes en français, Kasumi Yasuda change quatre fois le niveau de lecture. Et c’est à la lecture du quatrième que l’on comprend – ou que l’on décroche – qu’en réalité, le jeune auteur expérimente.

Baigné dans les films sous haute tension – citant Joker de Todd Phillips – Kasumi Yasuda raconte un contexte social plutôt que le dévelop­pement d’un personnage. Toshiro est le vaisseau qui nous permet de traverser l’univers que Kasumi Yasuda construit au fur et à mesure que sa réflexion évolue. Et il ne prend aucune pincette sur les inégalités et l’ingérence politique.

Les nuits folles de Fool Night sont-elles sombres, toujours plus sombres ?

© FOOL NIGHT © 2021 Kasumi YASUDA / SHOGAKUKAN

Bon ou mauvais ?

Fool Night s’éparpille à mesure que l’enjeu prend forme. Le lecteur n’a aucune garantie que l’auteur sait où il va. Cependant, la série explore de façon très intelligente les injustices sociales aux répercussions humaines glaçantes. Ne serait-ce que pour savoir comment les personnages vont se dresser face à l’horreur d’une société qui méprise les pauvres, ça vaut le coût d’en poursuivre la lecture. Fool Night est percutant.

D’autant que Kasumi Yasuda possède un véritable talent de la mise en scène. Imprégnés de cinéma, son graphisme et sa narration visuelle sont brillants.

Fool Night ne remplit pas sa promesse, mais offre autre chose. Et pour ceux qui acceptent ce revirement, le voyage s’annonce tout aussi grandiose.

Article publié dans ZOO Manga N°11 Janvier-Février 2023

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