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La planche de la semaine : Le concombre masqué par Mandryka

Un vendredi sur deux, on découvre ensemble une planche de l'immense collection de la Cité de la bande dessinée et de l'image d'Angoulême qui propose jusqu'en août 2026 une exposition fascinante et sans cesse renouvelée : Trésors des Collections. Découvrez cette semaine la planche #42 : Le concombre masqué par Mandryka.

La planche de la semaine : Le concombre masqué par Mandryka

Le mot du commissaire de l'exposition, Jean-Pierre Mercier

Né en 1940 à Bizerte (Tunisie) dans une famille d’immigrés russes, Nikita Mandryka est dès sa prime jeunesse un avide lecteur de bandes dessinées. Tombé sous le charme du Copyright, un strip nonsensique dessiné par Jean-Claude Forest et brièvement paru dans Vaillant en 1952, Mandryka se met à dessiner pour son plaisir des petites bandes dessinées dans le même esprit. Il invente bientôt pour lui-même le premier héros végétal de la bande dessinée et, à l’image du Fantôme du Bengale ou de Zorro, en fait un héros masqué. Ainsi naît Le Concombre masqué, légume justicier.

Cette création improbable devient le personnage fétiche de Mandryka, qu’il dessinera tout au long de sa carrière. Le personnage connaît au fil des ans de multiples évolutions graphiques et thématiques, au gré des publications dans Vaillant, Pilote, L’Echo des Savanes et Spirou.

Nous sommes ici en présence du septième gag du Concombre masqué, qui a fait ses premiers pas publics dans Vaillant moins de deux mois plus tôt, en avril 1965. Clairement influencé par les classiques américains (Krazy Kat, Smokey Stover, mais aussi The Peanuts) Mandryka, qui signe encore Kalkus, met en place la confrontation entre son héros Le Concombre et les Tromp’ la-mort, une troupe de fantassins qui traversent systématiquement la bande au pas de charge en écrasant tout sur leur passage. Inutile de dire que dans ces affrontements express, c’est toujours le Concombre qui a le dessous et finit piétiné.

La bande gagnera ensuite en loufoquerie et en invention langagière, la fascination de Mandryka pour les théories freudiennes s’y fera sentir, mais ces premières aventures du Concombre, aujourd’hui méconnues, car n’ayant pas fait l’objet de rééditions depuis plus de quarante ans, n’ont rien perdu de leur charme.


Le mot du chroniqueur de ZOO, par Frédéric Grivaud

Sur cette illustration mettant en scène le fameux Concombre Masqué, Nikita Mandryka signe encore Kalkus. On peut apprécier la minutie du dessin et le soin porté à l’encrage, plus particulièrement le fond qui n’est pas sans rappeler les Kirby Krackle de Jack Kirby en extrêmement plus fin.

Il faut préciser que cette illustration servira ensuite de couverture pour le recueil « Les aventures potagères du Concombre Masqué » réédité en 2016 chez Mosquito, qui rassemble les premières pages en noir et blanc parues dans Vaillant.

Cet univers naissant renvoyait initialement à toute cette culture du nonsense développée en littérature par des auteurs anglais comme Edward Lear ou Lewis Carroll, qu’on retrouva ensuite en BD avec Krazy Kat de Herriman, principalement, et plus tard aussi sur le surprenant strip de Jean-Claude Forrest, Le Copirit (lui aussi récemment réédité chez Apocalypse en 2024). À partir de cette « filiation », Mandryka va animer une série farfelue autour d’une sorte de légume justicier complètement en décalage, entouré de personnages tous aussi barrés que lui, comme son ami souffre-douleur Chourave, ou encore les multiples éléphants qui traînent dans les coins…

Le dessin va bien évidemment évoluer au fil des décennies, mais je vous conseille de regarder d’un peu plus près ces premiers strips qui sont d’une vraie beauté graphique. Assez différent de ce qui suivra, mais déjà très intéressant.

La planche de la semaine : Le concombre masqué par Mandryka

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