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La planche de la semaine : Ragnar par Coelho

Un vendredi sur deux, on découvre ensemble une planche de l'immense collection de la Cité de la bande dessinée et de l'image d'Angoulême qui propose jusqu'en août 2026 une exposition fascinante et sans cesse renouvelée : Trésors des Collections. Découvrez cette semaine la planche #47 : Ragnar par Eduardo Teixeira Coelho

La planche de la semaine : Ragnar par Coelho

La planche de la semaine : Ragnar par Coelho
© CIBD 2025

Le mot du commissaire de l'exposition, Jean-Pierre Mercier

Le dessinateur portugais Eduardo Teixeira Coelho (1919 - 2005) est principalement connu en France pour les séries historiques qu’il a dessinées du milieu des années 1950 au milieu des années 1980 pour le journal , devenu plus tard Pif Gadget. On se souvient de Davy Crockett, Robin des bois, Erik le Rouge

Mais son œuvre a connu quatre époques, qui correspondent à des changements dans sa vie personnelle. Né au Portugal, il publie d’abord dans son pays des séries d’aventures et d’histoire, dans le style graphique puissant qui sera toujours le sien, marqué par les classiques de l’âge d’or américain. Au début des années 1950, il s’établit au Brésil comme illustrateur jeunesse, tout en publiant pour l’Espagne et la Grande-Bretagne. Comme on l’a vu, il émigre ensuite en France au milieu des années 1950 et publie non seulement dans Vaillant/Pif Gadget, mais également dans L’Humanité, pour les éditions Jeunesse et vacances… On se souvient également de sa contribution plus tardive aux séries publiées chez Larousse L’histoire de France en bandes dessinées puis La Découverte du monde en bandes dessinées. La dernière époque, qui correspond à l’automne de sa vie, le voit s’installer à Florence où, tout en continuant à dessiner, quoiqu’à un rythme bien moins soutenu, s’adonne à la peinture. Reconnu dans son pays d’origine quelques années avant sa disparition, il a bénéficié là-bas, depuis, de plusieurs rééditions et d’une exposition rétrospective. La planche de cette semaine provient d’un épisode de sa série « française » la plus connue, Ragnar, dessinée sur des scénarios de Jean Ollivier.

Viking qui parcourt les mers froides, Ragnar vit des aventures qui touchent parfois au fantastique et exaltent, comme souvent dans Vaillant, la lutte des plus pauvres contre les riches qui les exploitent. Dans ce contexte, Ragnar est souvent « l’agent extérieur » qui va mettre fin à l’oppression d’un puissant contre des exploités. On reconnaît là un schéma narratif commun à Yves le Loup, Rahan et quelques autres séries réalistes de l’hebdomadaire Vaillant/Pif, d’obédience communiste.

Coelho dessine ses histoires avec énergie et brio. On peut apprécier ici l’agencement symétrique des cases dans la page, la justesse élégante du rendu des vagues dans la vignette centrale et surtout le contraste du noir et du blanc, parfaitement maîtrisé. A côté des aplats bien opaques, on distingue sur cette planche des zones qui tirent vers le gris, d’autres vers le brun. Ces nuances ne découlent pas de la volonté de l’artiste, mais de la variété des outils dont il s’est servi pour dessiner sa page. A côté de l’encre de Chine étalée au pinceau et remarquablement stable dans le temps, les traits plus fins des feutres changent lentement de couleur, avant de s’effacer irrémédiablement…

Le mot du chroniqueur de ZOO, par Frédéric Grivaud

Témoin privilégié de l'évolution de la bande dessinée, Eduardo Teixeira Coelho semble néanmoins se positionner entre plusieurs influences. Qu’il s’agisse des strips américains, comme des aventures qui remplissent les revues françaises entre les années 50 et 80, son dessin élégant joue très adroitement sur les expressions et les jeux de regard.

Toutefois, sur la planche présentée cette semaine, on peut observer le contraste très fort qu’il y a entre les plages de noir très marquées et les encrages beaucoup plus fins dès qu’il s’agit des premiers plans. Ce qui est principalement dû aux outils utilisés, entre le pinceau et la plume ou le feutre.

De plus, quand on observe le découpage en trois bandes, classique chez tous ces artistes habitués non seulement au travail en strip, très courant dans la presse et plus facile à manipuler sur la table à dessin, on se rend compte qu’il rythme aussi le récit de la planche lui-même. Le premier strip met en scène Ragnar qui trouve l’idée qui lui permettra d’échapper à ses poursuivants teutoniques. Le second strip nous ramène auprès du baron qui pense avoir battu son adversaire et le troisième strip révèle le plan de Ragnar et la déconvenue du baron… Une construction très classique, mais une nouvelle fois très efficace, car elle donne du rythme à la lecture et permet de donner envie de lire la suite.Ragnar | Sièvre, Martin : La planche de la semaine : Ragnar par Coelho

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