Auteur de BD et de romans, scénariste, designer, storyboarder et réalisateur pour la télé et le ciné... Olivier Péru ne chôme pas et parle avec passion et sympathie de ses projets. Nous avons rencontré ce boulimique de travail qui sera présent au Salon du Livre 2014 !
Une imagination débordante
Quand as-tu commencé à t’intéresser à la bande dessinée ?
Couverture de la Guerre des Orcs T.2
Mon parcours commence jeune. J’ai appris à lire sur X-men quand j’étais petit. A 4-5 ans, il paraît que je faisais une crise quand je n’avais pas le magazine Strange dans les mains. J’inventais les histoires d’après les images quand je ne savais pas encore lire. J’inventais leurs noms, leurs dialogues et tout. A 6-7 ans, je me disais que plus tard, je ferais les X-men. Je n’ai jamais envisagé de faire autre chose.
J’étais aveugle sur la réalité du métier et cela m’a sauvé. Je me disais que plus tard, je raconterai et dessinerai des histoires, que je ferai de la BD, des films. Je ne me posais pas de questions. J’ai toujours dessiné et écrit. A 20 ans, j’ai commencé à envoyer mon travail à des éditeurs sans me remettre en question. Les éditeurs m’ont envoyé refus et critiques et je me suis toujours accroché.
Quel a été ton premier projet professionnel de bande dessinée ?
A 23 ans, l’éditeur Semic a ouvert ses pages à des jeunes auteurs. J’ai rencontré Thierry Mornet, mon « papa » de la BD. Il m’a permis d’écrire et dessiner des petites histoires qui m’ont appris le métier. J’ai un peu appris l’édition comme ça et j’ai progressé.
Très vite, je suis entré en contact avec Soleil. J’ai fait une première série, Shaman, sur laquelle ça s’est bien passé. Je dis toujours aux jeunes auteurs ou mes collaborateurs dessinateurs de ne pas se décourager : un album en appelle toujours un autre !
Tu as commencé en tant que dessinateur. Pourtant, aujourd’hui, tu es principalement scénariste. Pourquoi ?
J’ai vite réalisé que le dessin était trop chronophage. Des dessinateurs me demandaient toujours des scénarios et du jour au lendemain j’ai arrêté de dessiner. J’ai commencé Zombies, Nosferatu, La Guerre des Orcs. Maintenant, je dessine moins et j’écris pour d’autres dessinateurs.
Extrait de La Guerre des Orcs T.1
Je me crois d’ailleurs meilleur scénariste pour les autres que pour moi-même. J’ai tendance à baisser le niveau de mon scénario pour me faciliter le dessin. Quand j’écris pour les autres, je suis exigeant avec moi-même et les autres. Je reçois des retours positifs de leur part et ils me poussent à faire encore mieux.
Comment abordes-tu la conception de tes scénarios ?
J’aime bien prendre quelque chose de connu et chercher un axe de narration différent pour emmener le lecteur ailleurs. Je ne vais pas surprendre par le sujet mais souvent mes lecteurs lisant peu de fantasy me font des retours très positifs. Par exemple, Mjöllnir a très bien fonctionné. Zombies aussi : on peut encore raconter des choses nouvelles sur des thèmes à la mode.
Je ne suis pas un génie non plus, mais je cherche des petites idées nouvelles. Les Elfes blancs, ces Elfes hautains, méprisants et intelligents sont là depuis des millénaires. Je voulais raconter le destin d’un Elfe blanc à côté, attiré par l’humanité et les failles que les Elfes peuvent avoir en eux. Tous les passages obligés de la fantasy sont réunis : le voyage, le grand spectacle, les cavalcades à dos de cheval ou de dragon. Il y a un mélange d’ingrédients, de marqueurs dans l’album et par lesquels il faut passer. Je voulais humaniser cet Elfe blanc.
Et côté romans ?
Quand j’ai arrêté de dessiner, j’ai pu me consacrer à l’écriture de romans. Je dévorais Stephen King petit. Je lisais autant de BD que de romans. Je me suis lancé vers mes 30 ans (j’en ai 36 aujourd’hui). Mon premier roman n’était pas bon mais c’était surtout un exercice. Puis j’ai écrit le roman Druides. Je m’y suis approprié le mythe du druide à ma façon, avec ce gardien de la forêt et enquêteur surnaturel. Eclipse a édité ça assez vite. J’ai eu de la chance car le roman a bien marché, j’ai gagné des prix et les gens en littérature m’ont découvert. Tout cela m’a donné une crédibilité en tant qu’auteur littéraire. J’ai maintenant carte blanche pour écrire mes romans comme un auteur, un vrai.
En 2013, la série Martyrs est parue chez « J’ai lu ». Elle est comparée au Trône de fer car l’univers s’y prête. Il s’agit d’un monde médiéval fantastique, historique mais pas trop. C’est une guerre sur fond d’enjeux amoureux avec deux frères assassins. Alors qu’ils sont habitués à tuer dans l’ombre des ruelles, un des deux tombe amoureux d’une grande dame. De l’ombre, ils se retrouvent en pleine lumière. L’histoire sera en trois tomes de 800 pages, le deuxième ne va pas tarder à sortir.
Des projets plein la tête
Ton tome d’Elfes, a remporté le prix lycéen de la BD !
Jean-Luc Istin m’a proposé d’embarquer dans l’aventure Elfes, il y a 2 ans. Comme beaucoup, je tripe beaucoup sur la fantasy, Tolkien et autres. Changer d’univers me tentait bien sûr. Et je n’avais pas besoin de trop réfléchir sur une race sur laquelle j’ai déjà beaucoup lu.
Extrait du tome 3 d'Elfes
Il m’a proposé de choisir ma couleur de race. J’ai proposé de partir dans les extrêmes. Avec les Elfes bleus, j’aurai pu raconter une histoire sur les océans, surtout que je suis un gamin de la mer. Mais blanc ou noir me plaisait plus. Ce sont des extrêmes sur lesquels on peut raconter une histoire très contrastée. Marc Hadrien était déjà branché sur les Elfes noirs. Du coup, les blancs me convenaient très bien.
Tu touches également à d’autres domaines que la bande dessinée!?
J’ai une liste de rêves d’enfant à réaliser. Il y a faire de la bande dessinée, écrire des romans, faire un film, faire une série TV, faire un jeu vidéo. Je coche au fur et à mesure. Pour la BD, aujourd’hui, j’écris sur des univers complètement différents. Je prends plaisir en changeant d’univers, d’écriture, de musique. Si je devais dessiner moi-même ces albums, je pourrais en faire qu’un par an et je m’en voudrais de perdre autant de temps. C’est l’amour des histoires différentes qui me poussent à écrire pour d’autres.
Tu travailles aussi sur la série Hero Corp avec Simon Astier. Comment es-tu arrivé sur cette aventure ?
Illustration de la bande dessinée Hero Corp
L’aventure Hero Corp a commencé il y a longtemps. Je travaillais avec la société de production Calt, qui a produit notamment Kaamelot et Caméra café. Un des producteurs m’a parlé d’ Hero Corp et je dois être le deuxième ou troisième gars à être entré dans le projet. J’ai rencontré Simon Astier. On s’est tout de suite bien entendu. Il a développé toute la série, je l’ai juste aidé en dessinant les personnages et des costumes pour la démarche auprès des chaines.
Dès le début de la série, on voulait que l’imagerie BD soit intégrée dans la série. Par exemple, comme c’est un monde de super-héros, ils n’ont pas de journaux mais ils lisent des nouvelles dans les comics. Faire un générique BD donnait cette couleur à la série. J’ai aussi fait les storyboards sur certaines scènes d’effets spéciaux et des costumes. Il y a une vraie famille autour d’Hero Corp, c’est mon projet chouchou. Hero Corp forever ! Nous en sommes à trois saisons et on attend de savoir s’il y en aura une quatrième. J’ai toujours été optimiste sur cette série donc j’y crois.
Faisons un point sur ta checklist : BD, romans, télévision. Qu’en est-il du reste ?
En fait, je suis hyperactif mais je me soigne ! Je ne dors pas beaucoup, 2-3 heures par nuit, ce qui me fait des journées très longues et beaucoup d’heures pour faire plein de choses. J’ai besoin de faire toujours deux choses en même temps sinon j’ai l’impression de m’ennuyer. Je suis incapable de « perdre » mon temps. Je crois au fond de moi que je suis feignant et je fais tout ça pour me préparer à l’être. Dans 20 ans, je serai une grosse feignasse !
J’ai beaucoup de projets en cours avec des gens que j’aime, quel luxe ! J’aimerais faire des jeux de société car j’adore la structure des jeux et c’est un projet sur lequel je veux travailler. En fait, ma seule constante est de me disperser ! Je ne peux pas faire les trucs simplement.
Tes projets de bande dessinée à venir ?
Pour Zombies, nous avons écrit le deuxième cycle avec Sophian. Nous créerons aussi des one-shot sur comment se passe l’épidémie ailleurs dans le monde. Je finis également une série commencée avec Istin et Alexe, Lancelot. Pour Mjöllnir, le premier diptyque ayant bien marché, l’éditeur est d’accord pour la suite, on a plein d’idées avec Pierre-Denis, on va s’y mettre.
Je travaille aussi sur un tome sur les maîtres inquisiteurs, série sur le même principe que Elfes. C’est un univers médiéval fantasy sombre, avec du polar dur. J’ai également fini le premier tome de la série Oracle, avec Martino. Et enfin, je travaille déjà sur la suite d’Elfes : on ne change pas une équipe qui gagne. Nous gardons les mêmes duos avec les mêmes couleurs. On est déjà à la moitié de notre second tome blanc.
Ilustration pour la série Zombies
Votre Avis