Plusieurs livres et films ont raconté la révolte des Nord-Irlandais contre un gouvernement britannique sanguinaire. Avec son récit centré sur Long Kesh, Stéphane Heurteau signe un nouveau polar taillé à la hache sur fond d'Histoire. Une œuvre majeure.
Dans les années 1970, le pouvoir britannique écrase l'Irlande du Nord sous son joug. Ils sont plusieurs à farouchement s'opposer à cette colonisation des temps modernes, décuplée par le gouvernement Thatcher. Dix se battront jusqu'à la mort, après la grève des couvertures, des vêtements, puis de l'hygiène et de la faim. Parmi eux, Bobby Sands, leur leader. Il a connu le pire dans les geôles de Long Kesh, la prison de Maze. Jusqu'à son dernier souffle. Cette BD aussi réussie qu'horrifiante raconte son combat, mais aussi un projet d'évasion. Stéphane Heurteau nous parle de Long Kesh, son roman graphique puissant et éprouvant.
Pourquoi vous êtes-vous intéressé aux prisonniers nord-irlandais ?
Stéphane Heurteau : Ado, je les ai vus revêtus de couvertures à la télé. Comme on les appelait les Blanket men, je croyais qu'ils volaient de la blanquette ! Ils étaient très maigres, nus, avaient les cheveux longs, les yeux exorbités et une volonté farouche. Je me suis dit qu'il faudrait que je fasse quelque chose sur eux un jour. Trente ans plus tard, lors d'un premier voyage en Irlande, nous étions logés chez un musicien du Donegal. Il avait un pub privé dans son jardin et un mausolée en hommage aux dix grévistes de la faim dans la prison de Long Kesh, dont Bobby Sands. Ça a relancé mon idée.
Trouver un éditeur a-t-il été difficile ?
Oui, le projet a été refusé deux fois par Dargaud, mais aussi par Casterman, Bamboo... Je ne suis pas assez banquable ! Mais ce sujet me tenait à cœur et même s'il m'a pris cinq longues années dont deux de travail à temps plein, il fallait que je le mène au bout.
Vos recherches historiques sont colossales...
Oui, j'ai regardé pas mal de films : Hunger, Au nom du père... Bobby Sands jusqu'au bout de Denis O'Hearn est devenu mon livre de chevet. Je me suis aussi beaucoup servi des archives de l'Ina et de la BBC et je suis retourné en Irlande.
Qu' est-ce qui vous a le plus fasciné chez ces prisonniers politiques ?
Leur volonté démesurée qui force le respect et leur charisme : aller au bout de ses idées à ce point-là, c'est démentiel.
Article publié dans le magazine Zoo n°73 (Septembre-Octobre)
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