Mafalda est une petite fille née en 1964 sous le pinceau de Quino. Si elle a arrêté de se promener dans les strips de son papa en 1973, elle revient exceptionnellement chez Glénat grâce à un collectif d’autrices, pour fêter ses 60 ans !
Quand Mafalda est-elle entrée au catalogue Glénat ?
Jacques Glénat : En février 1980. J’avais rencontré l’agent de Quino, Marcello Ravoni, avec qui il avait fui l’Argentine. J’ai tout de suite aimé cette petite fille et sa bande d’amis qui avaient une vision très critique du monde, à hauteur d’enfant. Mafalda avait été publiée par Jean-Claude Lattès dans les années 70, mais n’avait pas connu de succès. Nous avons convaincu Quino de coloriser les strips et de les publier en albums cartonnés pour accéder à un public plus large. Cela a fonctionné.
Parlez-nous de Quino…
Jacques Glénat : Quino était un monsieur charmant. Je le rencontrais à la Frankfurter Buchmesse, où il venait discuter avec les éditeurs qui publiaient Mafalda dans le monde. Il habitait à Milan, Madrid et Paris. Une statue de Mafalda va d’ailleurs prochainement être installée par la mairie devant l’immeuble où il vivait dans le 13e arrondissement. Quino est venu pour la dernière fois à Paris en 2014 et a été décoré de la Légion d’honneur.
Un hommage avec treize autrices pour les 60 ans ?
Valérie Aubin, éditrice : Nous avons établi au préalable une liste d’autrices avec lesquelles nous avions envie de collaborer et dont nous aimions particulièrement la personnalité, le travail, l’univers, et dont le style graphique pouvait également coller avec l’esprit de Mafalda. Le résultat est divers, multiple, réjouissant !
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Un sacré bout d'enfant, Mafalda.
Valérie Aubin : Mafalda est appréciée, car elle est rebelle, contestataire, déterminée. Elle porte en elle un engagement. Elle tient tête aux adultes, s’indigne de la façon dont ils dirigent le monde, et révèle leurs contradictions. Elle se méfie de leur langage et de leurs discours. Au lieu de jouer à la poupée, elle préfère s'interroger sans cesse. En remettant en question l’ordre établi, Mafalda a posé les fondements d’une conscience politique pour de nombreux lecteurs et lectrices, dès leur plus jeune âge. Avec ses amis, elle se pose des questions sur la guerre, les inégalités sociales,le racisme, les femmes, la corruption, l’état de la planète, l’injustice… Des thématiques qui sont toujours d’actualité. Mafalda a l’art d’éveiller les consciences, tout en faisant rire.
D'autre projets pour fêter les 60 ans de Mafalda ?
Valérie Aubin : Nous allons également ressortir, pour la fin de l’année, une nouvelle version de l’intégrale déjà existante, enrichie d’un appareil critique. Un travail mené par Claire Latxague, qui a rédigé une thèse sur Quino, et qui replace Mafalda dans son contexte argentin. Mafalda a accompagné les Argentines et les Argentins pendant les sombres années qui ont vu se succéder crise économique, paupérisation de la classe moyenne et dictatures. Elle a marqué toute une génération.
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Quand les autrices parlent de leur participation à cet hommage…
Marie Bardiaux-Vaïente invite Solveig, petit garçon scandinave, dans le groupe d’amis de Mafalda, dessiné par Gally.
« Mafalda peut être lue dès 8 ans, âge où je l’ai découverte et, en même temps, être relue tout au long de sa vie. C’est une héroïne qui n’est pas dans l’aventure, dans laquelle toutes les petites filles peuvent se retrouver. Il faut avoir beaucoup d’humilité pour rendre hommage à Quino. Ça a été un beau défi : je ne fais pas d’humour normalement, ni de jeunesse, ni de strips ! Ce travail m’a beaucoup enrichie. J’ai choisi de parler de justice parce que c’est un de mes thèmes de prédilection. »
Aude Picault dessine une Mafalda devenue adulte.
« Mafalda représente à mes yeux l’icône du dessin de presse. Elle a permis à Quino d’aborder tous les sujets d’actualité de son époque. Ce fut un défi et un plaisir graphique que de dessiner Mafalda en suivant le trait de Quino, qui m’a tant marquée. Se caler sur le dessin d’un.e autre est toujours instructif, on comprend ses “trucs”, ses trouvailles, ses amusements… À tenter de copier Quino, j’ai vite touché mes limites, son écriture est si exigeante ! »
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Anne Simon met en lumière des évolutions positives depuis l’époque de Mafalda : libération sexuelle, prise de conscience écologique…
« Mon premier souvenir marquant de Mafalda est un strip où elle cherche sa mère pour lui demander ce qu’elle pense du mouvement de libération de la femme, puis se retrouve nez à nez avec elle, à quatre pattes, en train de nettoyer le sol. Je pense que ça a été un de mes premiers “sursauts” féministes. Quand on lit Mafalda, on se rend compte que, malheureusement, ses questionnements et ses craintes sont toujours d’actualité : défense des droits des femmes, guerres dans le monde, bêtise des politiciens… Il ne faut donc jamais baisser la garde. »
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