Pendant l’été, l’équipe de Zoo vous entraîne dans les ateliers des dessinateurs et dessinatrices. Aujourd’hui, la coloriste Evelyne Tranlé (Le bouclier arverne, Ballade pour un cercueil, Le Spectre aux balles d'or, Nez cassé, La Longue marche, la série Valérian…) nous ouvre la porte de sa chambre-atelier au cœur de Paris.
Bonjour Evelyne, votre atelier est une pièce de votre appartement. Avez-vous toujours travaillé chez vous ?
Evelyne Tranlé : J'ai toujours travaillé chez moi, dans une petite chambre pleine de peinture, de couleurs, de papier, de pinceaux... Ça a toujours été comme ça.
Est-ce que c'est un besoin de vous retrouver dans cette pièce pour travailler ?
E.T : Je fais surtout avec ce que j'ai, je fais avec chez moi.

Evelyne Tranlé au travail dans son atelier parisien, devant sa table à dessin
© ZOO Le mag - Mélina Saysana
D'avoir choisi cette pièce-là, c'est parce qu'elle était disposée comme ça, ou c'était par rapport à la lumière, aux éclairages ?
E.T : Non pas forcément, parce que je travaille toujours avec une ampoule en plus sur ma table, même si j'ai un très bon éclairage. Parfois, je travaille pendant une heure ou deux sans lumière, mais très rapidement, je rallume.
À l'époque où vous faisiez les couleurs de Valérian, de Blueberry, de Philémon, aviez-vous un rythme de travail bien défini ou c'était au fur et à mesure de la journée ? Comment vous organisiez-vous ?
E.T : Aujourd’hui, je suis largement à la retraite. Mais à l’époque, l'éditeur, il m'attendait alors c'était toujours pressé, donc il ne fallait jamais perdre de temps. Et puis, comme c'était quand même un travail très, très long et qui demandait beaucoup d'heures par page, j’étais obligée de travailler régulièrement, tous les jours, même fréquemment le samedi et le dimanche. J'étais habituée.
Vous travailliez sur plusieurs séries en même temps ?
E.T : Quand j'étais déjà sur un album, c'était rare qu’on me mette sur un autre. Ou alors si on me demandait une petite intervention pour deux ou quatre pages, à ce moment-là, j'arrêtais l'album sur lequel j'étais pour faire les pages, et puis c'est tout. Mais je ne travaillais jamais vraiment sur deux albums en même temps. Ce n’était pas possible.

La palette de couleurs d’Evelyne Tranlé, au service de séries cultes comme Valérian
© ZOO Le mag - Mélina Saysana
Et est-ce que les dessinateurs vous donnaient la totalité de l'album à faire ou les pages arrivaient au fur et à mesure ?
E.T : Ah non, je n'ai jamais eu un album entier à faire. C'était l'éditeur qui me donnait les « bleus d’impression », on me livrait en général, un minimum de quatre pages à chaque fois. Je faisais au fur et à mesure, mais je n'avais jamais un gros paquet qui attendait chez moi. Ce qui ne m'empêchait pas de travailler tous les jours de la semaine.
Et est-ce que pour faire vos couleurs, vous aviez besoin de vous mettre dans une condition particulière, une ambiance particulière ?
E.T : Non pas spécialement, avoir pris un bon petit déjeuner, avoir fait une petite sieste aussi, et puis hop, après ça démarre !

La technique des bleus d'impression, outil central dans le travail de colorisation d’Evelyne Tranlé.
© ZOO Le mag - Mélina Saysana
Est-ce que dans votre atelier, il y a des objets autour de vous qui ont participé justement à cette création ? Est-ce qu'il y a des objets importants dont vous aviez besoin pour créer ?
E.T : Non pas vraiment, cette pièce de mon appartement est une petite chambre que j'aime bien avec plein de dessins de mes petits-enfants. Il y en a plein les murs, et puis des photos, des photos de vacances... j’aime surtout être entourée de souvenirs personnels.
Tout à l'heure lorsque nous sommes arrivés, il y avait un petit peu de musique en bruit de fond dans votre pièce principale, vous travaillez en musique ?
E.T : Toujours, toujours, je ne vais pas dire jour et nuit, mais presque, je suis sur France Musique toute la journée.
Pendant les vacances, aviez-vous aussi des pages à faire ?
E.T : Absolument ! Je vais depuis des années à Dieppe, en Normandie, dans un petit appartement. Et dans ma chambre, j'ai une table exactement comme ici, c'est toujours la même ambiance, et la table, je ne la range pas, il y a toujours des vieux pinceaux, des couleurs et tout ça. J'aime bien y retourner, m'asseoir, faire n'importe quoi. C'est un bon moment.

Le matériel d’Evelyne Tranlé, entre tradition artisanale et créativité quotidienne.
© ZOO Le mag - Mélina Saysana
Vous avez donc transposé votre petit atelier parisien, en province ?
E.T : Tout à fait, et partout si j'allais ailleurs. Je voulais toujours une table dans un coin tranquille, près de la fenêtre, pour pouvoir faire des pages. Parce que des pages j’en avais toute l'année et je n'avais pas du tout un rythme de vie comme quelqu'un qui travaille dans un atelier, avec un mois et demi de vacances. Non, moi je travaillais toujours et j'étais toujours en vacances (rires).
Et est-ce que Jean-Claude Mézières , dessinateur de la série Valérian, venait voir votre travail, comment travailliez-vous ensemble ?
E.T : Non, Jean-Claude a toujours été super sympa sur mon travail, j'ai toujours pu faire ce que je voulais. Et quand je lui apportais mes pages qui étaient finies, quatre, cinq ou six à peu près à chaque fois, j'avais toujours une petite crainte sur ce qu’il allait me dire, je le regardais, il restait silencieux. Il tournait les pages, “ ça va, c'est bon ” qu’il me disait. Puis “ Oh, il y a juste un petit truc là, un petit éclairage sur l'épaule, je le ferai moi-même, je le ferai moi-même. ” C'était exactement comme ça que ça se passait.
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