La maison d’édition PLG s’est construite dans le prolongement du mythique fanzine P.L.G.P.P.U.R. La collection Mémoire Vive est la seule collection de livres sur la Bande Dessinée. L’équipe de ZOO a rencontré l’un de ses fondateurs Philippe MORIN.
Bonjour Philippe, pouvez-vous nous expliquer comment est née la maison d'édition PLG qui à l'origine était un fanzine ?
Philippe Morin : Oui, exactement. Il y a 47 ans, avec un copain de collège, Pierre-Marie Jamet, et un ami de ma sœur rencontré à la fac d'arts plastiques, nous avons décidé de créer un fanzine. J'avais déjà fait un petit fanzine au lycée.À cette époque, je traînais dans les festivals BD à Paris et je voyais des fanzines se vendre. Nous avons donc eu envie de faire le nôtre, surtout pour publier nos propres BD amateurs.

© PLG
En parallèle, nous voulions aussi interviewer de jeunes auteurs – pas les stars de l'époque, mais ceux qui émergeaient, comme Bilal, Goossens, Auclair ou Gibrat. Il y avait encore très peu de revues spécialisées, et les auteurs de BD étaient rarement interviewés. C'était donc une véritable originalité.
Nous étions étudiants, moi en architecture, et on publiait un numéro tous les trimestres. Cela a donné 39 numéros jusqu'en 2002. Nous avons arrêté avec l’arrivée d’Internet : il suffisait de chercher le nom d’un auteur pour trouver des interviews gratuites.

© PLG
Comment étiez-vous diffusés ?
P.M : C'était tout un défi. En 84-85, on tirait entre 2 500 et 3 000 exemplaires par numéro, qui s'épuisaient rapidement. Nous allions dans les festivals, comme Angoulême. Dès sa cinquième édition, nous avons eu un stand et en 1982, nous avons reçu le prix Alfred Fanzine. Et nous faisions aussi du dépôt-vente dans les librairies spécialisées de Paris.

© PLG
Un jour, un diffuseur est venu nous proposer une distribution plus large. Grâce à lui, on était présents en France, en Belgique, en Suisse. Ça a donné de la visibilité à notre fanzine, P.L.G.P.P.U.R., acronyme de Plein La Gueule Pour Pas Un Rond.

© PLG
En 2002, quand on a arrêté le fanzine, j'ai eu envie de développer une collection de livres, qui soient des livres sur la bande dessinée, parce qu'on s'aperçoit qu'il y a, finalement à cette époque, pas énormément de livres comme des monographies d'auteurs, ou des livres analytiques sur la BD. Harry Morgan et Manuel Hirtz ont alors publié Petite critique illustrée de la bande dessinée, qui va recenser le corpus qui existait à cette époque, et à partir de ce corpus, on a développé cette collection Mémoires vives, qui s'est développée. Aujourd’hui, elle compte 50 titres. Le 50e, c'est « Old School ? » que Rodolphe a écrit sur sa propre carrière de scénariste. Cette collection est dédiée à plein d'aspects qui montrent qu'on peut écrire sur la BD de façon intelligente, amusante, et intéressante. Nous avons fait d’autres ouvrages, notamment les histoires de la bande dessinée à travers le monde, puisqu'on s'est rendu compte que la France est un très gros producteur de bandes dessinées et que parallèlement, il y a beaucoup de pays qui ont une production petite, mais une vraie production (Chili, Espagne, Luxembourg…)


© PLG
Quel est le profil des auteurs que vous publiez ?
P.M : C'est très varié. On travaille avec des figures reconnues comme Thierry Groensteen, mais aussi avec des passionnés, parfois inconnus, qui proposent des manuscrits fouillés. Par exemple, nous avons publié récemment un livre sur l'éditeur Artima. C'était un acteur majeur des années 50-60, peu connu aujourd'hui, mais très important.
Nous ne publierons probablement jamais de livres sur Dupuis ou Hergé : d'autres le font déjà très bien. Nous, on s'intéresse aux niches.
Et qui vous lit aujourd'hui ?
P.M : Au début, c'était les anciens abonnés du fanzine. Puis les collectionneurs, et maintenant, de jeunes étudiants. Grâce aux écoles comme celle d’Angoulême, la BD est mieux reconnue. Nos livres deviennent des références pour les enseignants. C’est une vraie joie de voir une nouvelle génération intéressée par l’analyse et l’histoire de la BD.
Et aujourd'hui, combien de manuscrits reçevez-vous ?
P.M : Environ 7 ou 8 par an, mais je ne publie que 2 ou 3 titres. Je fais souvent retravailler les textes. Le programme est déjà complet jusqu'en 2027. Le Covid a même permis à certains amateurs de se lancer dans l'écriture. L’un d’eux a écrit un livre passionnant sur sa collection d’œuvres de François Schuiten, montrant comment celui-ci modifie ses albums au fil des rééditions.
Quels sont les prochains projets ?
P.M : En janvier 2026, on publiera un livre de Jérôme Dupuis et Olivier Bigard sur la collection du Lombard, la première collection d’albums de BD créée en 1950. Et un autre de Joe Pinelli, Meta BD, qui explique en bande dessinée comment faire de la bande dessinée, adapté de ses cours à l’Académie Royale des Beaux-Arts de Liège.

Ouvrage "Les secrets de la collection du Lombard" © PLG

Ouvrage "MétaBédé" © PLG
Vous continuez à lire beaucoup de BD ?
P.M : J’en lis environ une centaine par an. Je reste très curieux de l’actualité, surtout des nouvelles formes et sujets. Ce qui m’intéresse, c’est la liberté graphique et thématique. Je ne suis pas nostalgique. Je lis toutes les revues spécialisées et discute sur des forums. Ce marché est foisonnant, et je veux rester connecté à tout ce qui se fait.

Philippe Morin en 2025 © PLG

Philippe Morin enfant © PLG
Article publié dans le mag ZOO n°106 Septembre-Octobre 2025
Editeur
ZoomSurUnÉditeur



Haut de page
Votre Avis