Au milieu des années 90, Ekatarina survit comme elle peut en espérant une seule chose : le retour de son fils, miliaire en Tchétchénie. Alors quand elle apprend qu’elle peut le libérer en allant le chercher par delà la ligne de front, elle n’hésite pas. Regard décidé et petit chien sous le bras, cette femme de caractère nous embarque dans son périple mouvementé et émouvant.
Comme si la misère ne suffisait pas, il fallait qu’Ekaterina apprenne de son soulard d’ex mari que son fils, tout ce qui lui reste, est retenu par les Tchétchènes. Courage et foi en la parole donnée chevillés au corps, Ekatarina va alors découvrir l’envers d’un conflit sans fin.
Routes enneigés, maisons rasées, haines exacerbées : bienvenue dans l’enfer tchétchène aux côtés d’une mère qui n’a plus rien à perdre. Sa volonté inébranlable et son chien facétieux nous font découvrir une guerre absurde avec encore un soupçon d’espoir au fond des yeux. De péripéties réalistes en mots qui font mouche, ils nous entrainent dans les griffes d’un chef de guerre aux allures d’ogre, Bassaïev. Lucide sur l’horreur qui prend ses aises dans cette région de Russie, le récit laisse cependant transparaitre beaucoup d’humanité.
Cette touche lumineuse s’exhale des nombreux personnages, très bien campés. Avec leurs visages aux traits accentués, leurs postures qui parlent d’elles même et leurs regards très mobiles, ils ont une forte identité. Pour les emmener dans ce conflit à hauteur d’Hommes, la colorisation a joué de tous ses atouts. Les couleurs sont franches mais pas criardes, douces mais pas éteintes, variées mais harmonieuses. L’équilibre parfait entre le trait expressif et cette colorisation maitrisée donne à cette Amère Russie le charme aigre-doux qui lui sied.
Avec le dossier final sur les guerrières tchétchènes, passionnant, cet album a toutes les qualités d’une fiction reportage : bouleverser, instruire et faire réagir…
1 0