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Devenir Mangaka en France

Vivre de ses histoires, le métier passion ultime : être mangaka ! S’il s’agit du rêve de nombreuses personnes, rares sont celles qui y parviennent vraiment. Comment devient-on mangaka ?

My manga academia

Quand on est petit et que l’on rêve d’être astronaute, on compte sur la conseillère d’orientation pour nous trouver la formation adéquate. Or, s’il peut être difficile de trouver une école pour certaines professions, avec  le manga, la tâche est de plus en plus aisée. En France, il existe désormais plusieurs cursus dédiés : entre autres, l’école AAA Manga Paris et l’École Internationale du Manga et de l’Animation de Toulouse (EIMA). Cette dernière a notamment vu passer sur ses bancs des auteurs comme Loui (RedFlower, Glénat).

« Je me suis lancé dans le métier dans les années 2000, raconte Elsa Brants, mangaka autrice de Save me Pythie et de Myrtis. J’ai essayé d’intégrer des écoles de bande dessinée sur concours. Mais je n’étais pas du tout l’élève qu’elles recherchaient. Mon style manga ne plaisait pas. J’ai donc étudié à la fac d’arts plastiques de Montpellier. À l’époque (ce qui a dû changer depuis), je n’ai pas appris grand-chose… Les cours étaient beaucoup trop théoriques. J’ai appris à dessiner en autodidacte. Si faire une école n’est pas une obligation (un éditeur n’accepte jamais un dossier d’édition selon les diplômes), je le recommande malgré tout. On y obtient plus rapidement un niveau professionnel. »

Devenir Mangaka en France

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Rien ne sert de courir, mieux vaut concourir

Là où les écoles spécialisées peuvent être trop coûteuses ou sélectives, les concours organisés par des maisons d’édition sont ouverts à tous et peuvent rapporter gros.

« Si des concours avaient existé à mon époque, j’y aurais participé, affirme Elsa Brants. Un concours signifie que la demande vient de l’éditeur lui-même alors que lorsqu’on dépose un dossier, on s’ajoute au nombre incommensurable de propositions d’autres auteurs. Pour ceux qui débutent, c’est toujours une bonne chose de concourir. Cela permet de montrer son style. Et même si les participants ne gagnent pas, cela permet aux éditeurs de garder leur profil en tête et de voir leur évolution. »

« Pour se faire repérer par des éditeurs, il n’y a rien de mieux que les concours, appuie Tpiu, mangaka autrice Des héritiers d’Agïone. J’en ai fait beaucoup. J’ai été finaliste du concours international du Jump Plus organisé par MediBang avec mon one shot Draak. Ils m’ont ensuite recontactée ! Quand je suis allée au Japon, ils m’ont mise en relation avec un tantô, un responsable éditorial du Shonen Jump Plus. Les retours étaient longs à cause de la traduction. J’ai donc mis le Japon de côté. Mais cette expérience a été très formatrice. Le one shot, c’est la meilleure école. Généralement les aspirants mangakas ont envie de publier une série qui ne sera jamais terminée alors qu’avec un one shot de 30-50 pages, on a la satisfaction d’un travail achevé. On peut prendre du recul dessus, s’améliorer. »

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Me, myself and Ulule

Pour Tpiu, l’autoédition est un passage quasi obligé pour tout mangaka en devenir. « Au début, il est difficile de trouver un éditeur. Alors, pour faire découvrir ses histoires, il faut aller sur des festivals et éditer des doujin (fanzines). Tous les ans, je faisais la Japan Expo. J’ai pu créer une communauté au fur et à mesure. Puis j’ai arrêté les fanzines pour me lancer dans l’édition de “vrais” mangas. Je suis passée par Ulule, un site de campagnede financement participatif. J’ai ainsi pu éditer trois mangas au format classique : ADA Les Mystères de Cendréclat, Le Roi des Chapeaux et Tpiutopia. » « Quitte à débuter, plutôt que d’aller chez un petit éditeur avec peu de moyens, autant faire de l’autoédition, poursuit la jeune femme. C’est du travail, mais le revenu est intégralement pour le créateur et on apprend énormément. Pour devenir mangaka, il ne faut pas simplement avoir des idées de séries, il faut avoir un one shot complet afin de demander des conseils et pouvoir progresser. 

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Konkuru à la rescousse

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Le Weekly Shonen Jump ? Tout amateur de manga a déjà entendu ce nom. Créé par la Shueisha, la plus grande maison d’édition de manga au Japon, le Jump est un magazine de prépublication. De jeunes auteurs peuvent ainsi commencer à y raconter leurs histoires en espérant conquérir le cœur des lecteurs et par la suite une place en librairie. Au Japon, chaque maison d’édition possède son magazine. Quid de la France ?

En 2022, Konkuru a vu le jour. Chaque mois, le magazine publie des chapitres de série et des one shots. « Une immense partie de nos auteurs n’ont pas publié auparavant, explique Joffrey Defrance, directeur éditorial. Konkuru est capable de repérer des auteurs avant les gros éditeurs et de les rémunérer pour leurs histoires. On n’attend pas d’un auteur qu’il soit déjà professionnel, au contraire on a une volonté d’accompagnement, de conseil… Nous avons envie de publier des projets variés, de prendre des risques. Certains de nos auteurs ont par la suite signé dans de grandes maisons, notamment Nevan (L’Ombre de Moon) chez Delcourt. Il est possible de nous soumettre un dossier sur notre site, mais il arrive également que nous contactions nous-même un auteur prometteur. D’ailleurs, lors de notre première saison, nous avons eu un partenariat avec l’EIMA. »

Le mot de la fin

« Mangaka, c’est un métier dans lequel il faut être résistant, explique Elsa Brants. J’ai des copains qui avaient un meilleur niveau en dessin que moi, mais qui se sont tournés vers d’autres carrières parce qu’être auteur n’est pas facile. Quand on me demande si c’est bien d’être mangaka, j’essaie de dire le positif comme le négatif. Notamment, les problèmes administratifs, l’investissement intense en énergie… Mais je ne me verrais rien faire d’autre. Il vaut mieux tenter et abandonner plutôt que de ne pas tenter et de regretter. »

« Si on veut réussir dans le milieu du manga, il ne faut pas attendre et se mettre tout de suite au travail, conclut Tpiu. La seule chose dont on a besoin pour y arriver, c’est de la motivation et la soif de se surpasser. »

Article publié dans ZOO Manga N°13 Mars-Avril 2024

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