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Anuki face au Yéti !

 Stéphane Sénégas et Frédéric Maupomésont les heureux créateurs des aventures d’Anuki, le petit Indien. Pour le cinquième tome de la série, qui place le courageux garçon face au Yéti, ils ont répond à nos questions de concert !

Raconter sans paroles

Comment est né le tome autour du Yéti ?

Frédéric Maupomé  : On voulait aborder la mythologie indienne depuis un moment. Stéphane aime beaucoup dessiner des monstres et a proposé l’idée du Yéti/Big Foot/Sasquatch. Le scénario est arrivé très vite dès qu’on est parti de cette idée !

Stéphane Sénégas : Il y avait un vrai défi : l’histoire dans l’histoire, sans texte ! Nous voulions raconter la légende du Sasquatch dans Anuki sans casser le récit, d’où les images montrées par le chamane.

Frédéric  : D’habitude, les adultes sont absents et les gamins se débrouillent. Comment alors introduire un chamane très puissant dans l’histoire, sans pour autant qu’il résolve la situation à la place des enfants ? On est parti de là.

Comment travaillez-vous ensemble ?

Frédéric  : La première étape, c’est la validation d’une idée. L’un des deux propose et l’autre valide. Sur le quatrième tome par exemple, j’avais envie d’une scène de pluie, qui a tout déclenché !

Stéphane  : 9 fois sur 10, ça se fait en voyage, quand on est ensemble, en train de boire quelque chose : on en parle et on tombe d’accord. Et puis Fred écrit !

Frédéric : Mon scénario a l’air d’un album jeunesse avec ses textes d’ambiance.

Stéphane  : C’est plus agréable à lire vu que c’est romancé.

Frédéric  : Une fois que c’est validé par Stéphane, je fais un découpage planche par planche. D’ailleurs, il est de moins en moins détaillé, vu qu’on arrive à se comprendre sans mots ! A partir de là Stéphane crée un story-board, qui peut bousculer beaucoup le découpage. Comme il n’y a pas de dialogues, tout passe par le mime pour faire passer les émotions ! Le dessin montre donc ce qui fonctionne ou pas.

Parfois, une seule chose ne marche pas visuellement et on doit repenser des pans entiers du scénario ! On passe des heures à en discuter, à bouger des cases, couper des scènes, en rajouter !

Stéphane  : Et même si j’ai passé quatre jours à faire un dessin, je ne m’oppose pas à ce qu’il dégage de l’histoire ! Et inversement pour Fred ! C’est vraiment le récit et son rythme qui priment.

Frédéric : La discussion sur le story-board est très précise : des fois on déplace un caillou, ou on décale un peu un animal. On ne peut pas se rattraper par le texte dans un album muet!

Stéphane  : Le story-board, c’est le moment où on s’éclate le plus ! C’est là où tout prend cœur, avec le mélange du scénario et du dessin !


Vos 38 pages se révèlent être un format périlleux ?

Frédéric : Maintenant je fais tous mes découpages sur 30 pages parce que je sais qu’au moment du story-board, on ajoute des scènes. On a aussi un gros avantage : on n’a pas de contraintes rigides de pagination avec notre éditeur.

Stéphane  : Heureusement qu’on n’est pas contraint à 32 pages pile ! Car Fred et moi, on compose nos livres avec des moments de pause, ce qui est rare dans la littérature jeunesse. On pourrait les dégager par rapport à la pagination, mais c’est notre marque de fabrique.

Comment avez-vous composé ces planches du chamane ?

Stéphane  : Un peu comme mon premier album Pourquoi les libellules ont le corps si long un conte randonnée que j’avais construit sur le même système de frise que cette légende. Il fallait absolument montrer le côté primitif de l’écriture mais que mon dessin ait une souplesse d’animation.

Le Sasquatch aux grands pieds

Le Sasquatch de Marvel

Le Sasquatch de Marvel

Comment est né graphiquement le Sasquatch?

Stéphane  : J’ai commencé par voir des images des films et des comics. C’est le Sasquatch de Marvel qui m’a inspiré. Ensuite j’ai tout mélangé pour créer le personnage. J’ai commencé par sa manière de se déplacer : je le voyais comme un singe, marchant sur ses mains.

Au début, c’était très cartoon. Par touches, je lui ai enlevé le visage, le côté cartoon. Comme pour le loup du troisième tome, il fallait qu’il soit furtif, qu’on l’imagine avant de le voir. C’est vraiment un travail sur l’ambiance et la peur de l’inconnu.

Comment est venu le titre Grand-Pied ?

Stéphane  : Au début c’était : Big Foot ou Sasquatch. Sasquatch, ça claque, mais très peu de personnes connaissent. Et pour les petits lecteurs, ce n’est pas parlant. Un jour Marc Lisano nous dit simplement « Grand-Pied ! ». On trouvait ça très rigolo, donc on a gardé son titre !

Frédéric : Ce qui me permet de continuer à ne jamais trouver le titre des albums que je fais ! A part Les Supers avec Dawid mais je ne sais pas encore si ce sera imprimé comme ça !

Comment avez-vous créé vos Indiens ?

Stéphane  : Le jour où j’ai décidé que je ferai de l’édition jeunesse, c’est pour la liberté que ça me donnait ! Si d’un coup je veux faire un hippopotame violet avec une cape rose qui veut sauver une mamie dans les bois, pas de problèmes ! Ça permet d’avoir une distance par rapport à la réalité.

Donc grâce à ça, j’ai pu planter des tentes et mettre des poules, alors qu’elles n’étaient pas dans la région à l’époque. Il nous faut seulement un langage crédible, pas un côté réaliste.

Frédéric : C’est une histoire d’Indiens, fantasmés par les enfants. Même si au bout de quatre tomes je sais où ça se passe, vu que j’ai fait des recherches.

Pourquoi ce retour des poules ?

Frédéric  : Au fur et à mesure des tomes, on a de nouveaux animaux mais les enfants nous demandent des nouvelles des anciens. Donc on voulait remettre les poules, qui se sont calées toutes seules dans l’histoire avec un effet de contraste très fort.

Stéphane : Justement, elles nous permettent d’amorcer l’histoire tout en embêtant Anuki.

Les ambiances de couleurs sont très contrastées dans cet album !

Stéphane : Cet album est un vrai rodéo de couleurs : bleu, orange, blanc, sépia. C’est l’album qui m’a fait le plus peur au début ! Un vrai défi car il un a un vrai rythme de couleur !

Et quels sont vos projets en cours ?

Stéphane  : Le sixième tome avec une famille de grues et les premiers émois amoureux d’Anuki !

Frédéric  : C’est le moment où les enfants ont un rire particulier : c’est ce qu’on cherche !

Stéphane : Ainsi qu’une application Anuki, qui sort. Souvent dans les rencontres scolaires, les enfants veulent raconter une histoire mais arrivent pas à dessiner. Donc cette appli leur offre les outils pour le faire, plus des jeux et le making-of du tome 5. C’est gratuit en plus !

Ainsi qu’Adada, un livre à lire avec les enfants sur les genoux en leur faisant le cheval. On ne l’a pas encore signé !

Frédéric : Mais aussi une BD adulte, une comédie romantique : on est tout au début de l’écriture. On est en danger, car c’est une forme qu’on n’a jamais exploité avant. Sans compter qu’on est en contact avec une productrice pour mettre Anuki en court-métrage animé !

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