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Freakshow, bienvenue en enfer

Freakshow est un album qui ne laisse pas indifférent. Son influence assumée du pulp et son trait noir en font une œuvre originale qui ravira les amoureux du genre. Sébastien Chevriot revient sur ce projet et laisse entrevoir un univers qui a encore beaucoup à offrir...

Un projet longtemps désiré

Comment est né Freakshow ?

Sébastien Chevriot : C’est mon projet maudit. Depuis 2007, il est passé entre les mains de plusieurs éditeurs et a failli être signé plein de fois mais n’est jamais arrivé jusqu’au bout. J’avais totalement abandonné l’espoir de le relancer. L’éditrice de mon précédent album m’avait dit que ma BD était magnifique mais que mes têtes étaient trop grosses, ce qui est surement dû au fait que je viens de la caricature. J’ai gardé ce conseil en tête et je l’ai appliqué quand j’ai repris Freakshow il y a deux ans : ça a marché !

Extrait de Freakshow

À la base, Freakshow était une bande dessinée pour enfants que j’avais préparée pour la fin de mon master. Au bout de quelques planches, je me suis rendu compte que l’idée était bancale parce que l’album était beaucoup trop effrayant. J’ai donc divisé l’univers en deux. Le projet pour enfants, je l’ai mis dans Sally Pumpkins, en cours de réalisation depuis un an ou deux, et l’horreur dans Freakshow.

Qu’avez-vous modifié par rapport au projet initial ?

N’ayant pas pu sacrifier l’un des univers, j’ai décidé de les séparer en deux. Dans la BD jeunesse, j’ai tout changé même si l’univers est toujours un peu fantastique, proche de l’ambiance de Tim Burton.

Pour Freakshow, l’histoire a très peu changé. À l’origine, les deux enfants devaient être transportés dans une foire, après avoir rencontré le clown diabolique. Finalement j’ai effacé l’histoire du voyage et gardé le thème de la foire que j’ai rendu effrayante. J’ai complètement abandonné le côté jeunesse pour travailler l’aspect noir très intense.

La bande dessinée vous attire depuis toujours ?

J’ai un master en histoire de l’Art où j’ai suivi des cours de bande dessinée avec le professeur Jean-Louis Chazelas à qui il faut rendre hommage car il a sorti un bon nombre de dessinateurs professionnels. Il enseignait à Saint-Denis : même Loisel est passé par sa classe. C’est un vieux bonhomme atypique qui vaut le coup d’œil, un vieux gueulard qui te pourrit quand tu lui ramènes une planche, mais avec qui on apprend mille choses.

Quelles ont été vos influences pour cet album ?

L’influence principale reste Freaks, film que j’ai découvert assez tard car il a été censuré en France pendant très longtemps. Ce très beau film m’a beaucoup marqué avec sa réflexion sur qui est le véritable monstre. Pour ma trame, Les Contes de la Crypte sont évidemment une référence aussi. Chaque personnage a été construit sous une influence différente.

Je sais qu’il y en a qui ne se voient pas forcément, notamment Des Souris et des Hommes pour l’histoire du père pas très grand et de son fils, le géant, calqués sur le duo George, le petit malin, et Lennie, le géant un peu simplet. Il y en a des dizaines comme cela car j’adore créer des clins d’œil. J’ai aussi été influencé par Ca le téléfilm inspiré du roman de Stephen King, pour le clown monstrueux.

Comment avez-vous travaillé ?

J’ai l’histoire dans ma tête et je fais directement le story-board. En général, j’écris l’histoire assez tard, plutôt pour convaincre les éditeurs. Je réalise mes story-boards sur des feuilles A5, le plus petit possible, pour avoir l’aspect général de la page et bien voir apparaître les lignes de force pour toute la dynamique.

Le dessin est un hommage au pulp et à toutes ces histoires d’horreurs qui existaient quand j’étais petit, dessinées avec cette patte très noire et sombre. J’aime le noir et blanc, pas assez exploité en BD à mon goût. On peut cacher beaucoup de choses dans le noir. En BD, l'ellipse est essentielle tout comme le bord du cadre et le noir rajoute énormément à cet aspect « hors de la scène », très important dans le suspense. Ce qu’on ne voit pas crée beaucoup plus de suspense que ce qu’on voit.


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