ZOO

Benoît Guillaume fasciné par La Sorcière

Benoît Guillaume nous a présenté son dernier album, La Sorcière, adaptation réussie du roman de Marie Ndiaye. Il nous raconte sa rencontre avec cette histoire de transmission, de magie et de famille, qui en dit long sur l’humain.

Comment êtes-vous arrivé à la BD ?

Benoît Guillaume : Depuis très longtemps, je voulais faire de la BD mais j’ai été dans une école plus orientée vers graphisme. J’ai ensuite bossé quelques années comme graphiste pour des sites internet. Au bout de quelque temps, je me suis mis à mon compte et j’ai fait de plus en plus d’illustrations et de BD. Ces dernières années, je me suis aussi beaucoup mis à des carnets de croquis, dessins extérieurs et du reportage dessiné qui n’est pas forcément sous forme de BD. C’est quelque chose que j’aimerais développer car ça m’intéresse beaucoup !

Pourquoi avez-vous choisi ce livre ?

Les histoires de Marie Ndiaye m’inspirent depuis longtemps : j’aurais pu essayer de travailler sur n’importe laquelle, ou presque ! Certaines reposent davantage sur le texte, sur l’intériorité des personnages dont En famille, par exemple. J’adore ce récit mais je ne sais pas ce que ça aurait donné en bande dessinée.  Alors que La Sorcière s'appuie sur une narration un peu plus classique et efficace, ce qui ne veut pas dire sans surprises !

Comment avez-vous travaillé sur La Sorcière  ?

Avant La Sorcière, j’ai fait deux BD documentaires autour de la Birmanie avec un scénariste. C’était une forme assez traditionnelle : case, dessins et texte. Il y a encore d’autres formats de BD à explorer, ce que j’ai commencé à faire avec La Sorcière... Je crée toujours le dessin et les couleurs sont toujours créés sur papier avec des techniques traditionnelles. L’ordinateur est là simplement pour finaliser, pour faire la mise en page.

J’utilise des encres acryliques très denses pour La Sorcière et je crée des effets de transparence. J’aime essayer de nouvelles techniques : j’avais, par exemple, essayé la peinture à l’huile mais j’ai tout de suite arrêté car il faut de la patience contrairement à l’acrylique !

La magie y est très présente mais subtile. Comment avez-vous élaboré ce choix graphique ?

Il n’y a rien de très spectaculaire effectivement, ce n’est pas l’objet de l’histoire. Il s’agit plutôt de distordre légèrement la réalité pour raconter une histoire qui pourrait être normale : une famille qui se sépare. Pour que ça fonctionne, je devais soigner le graphisme.

La Sorcière est mon livre où les ambiances sont aussi recherchées : je n’ai pas pu réaliser un tel travail sur la couleur auparavant. Pour que le dessin, fait aux encres, laisse toujours pas mal de place à l’imagination, je ne rentre pas trop dans le détail. Même quand j’essaie, ça lutte avec ma façon de peindre, assez... énergique et rapide.  

Pour chaque séquence, je choisis une ambiance de manière plus ou moins improvisé... Si c’est nécessaire, je fais une rupture avec ce qui précédait. Question de rythme.

Les femmes y sont représentées comme figures fortes, voire inquiétantes, alors que les hommes sont souvent absents, démissionnaires, lâches. Est-ce que ce sont des thèmes qui vous ont intrigué ?

Je me suis souvent identifié aux personnages principaux des romans de Marie Ndiaye, qui sont des femmes à chaque fois. Mais le genre n’a rien à voir là-dedans. Ce sont souvent des personnages plein d’incertitudes, d’inquiétudes, des femmes souvent butées aussi, qui n’agissent pas toujours de la façon la plus attendue, comme Lucie dans La Sorcière...

Hé oui, les protagonistes de l’histoire ne sont pas tous reluisants, les hommes fuyants, c’est un roman réaliste, finalement, La Sorcière !

Quels sont vos projets ? Ont-ils un rapport avec vos prochains voyages ?

Quand je ne fais pas de BD, je suis souvent à dessiner dans mes carnets. Soit pour moi, soit pour le travail !

Je pars très bientôt pour la Birmanie, pour y faire une BD-reportage pour la revue XXI. Puis ce sera le Maghreb, en Tunisie avec un collectif marseillais autour de la question des migrants, et encore une résidence au Maroc sur un livre dessin/poésie. Ça me laisse tout le temps pour imaginer le prochain « gros » livre. Je ne me presse pas !

Haut de page

Commentez

1200 caractères restants