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Les éditions Cornélius fêtent leurs 30 ans

Les éditions Cornélius sont nées en 1991 dans le 18ème arrondissement de Paris sous l’impulsion de son fondateur, Jean-Louis Gauthey. Pendant 30 ans, la maison d’édition n’a pas caché sa ligne éditoriale éclectique mais exigeante. ZOO a rencontré son créateur pour l'anniversaire de sa maison d'édition.

Il y a 30 ans maintenant, Jean-Louis Gauthey fonde Cornélius dans son appartement du 18ème arrondissement de Paris. Cet autodidacte sera épaulé par Bernard Granger. Cette maison d’édition, sans ligne éditoriale prédéfinie, a comme ambition de proposer des albums de qualité à des prix raisonnables. Les raisons de la création de Cornélius sont fortement liées à l’histoire personnelle de son fondateur, qui souhaitait trouver «une occupation» plus qu’un travail. «J’avais la volonté de trouver une activité qui soit humaine, sans un patron, sans hiérarchie. Je ne pensais pas lancer une société. Je pensais faire davantage de la sérigraphie. Avec l’argent de la sérigraphie, j’allais faire des livres », explique-t-il.

Au début des années 90, la bande dessinée subissait une importante crise comme l’évoque Jean-Louis Gauthey. Beaucoup de sociétés sont rachetées comme Futuropolis, Dargaud et Dupuis. Il y a eu beaucoup de chamboulement et plusieurs petites maisons d’éditions ont disparu comme Artefact. «Ça a laissé beaucoup d’espaces pour des gens comme moi» explique Jean-Louis.

«Les grandes étapes ont été des grandes catastrophes!»

Les éditions Cornélius sont désormais installées depuis quelques années à Bordeaux, à la Fabrique Pola plus précisément. Ils ont publié entre 300 et 400 titres, avec quelques dizaines d'auteurs et autrices reconnus tels que: Lewis Trondheim, Shigeru Mizuki, Joann Sfar ou Blutch. Les fondateurs ajouteront leur pierre à l’édifice en publiant eux aussi mais sous des pseudos: Jean-Louis Capron pour Jean-Louis Gauthey et Blexbolex pour Bernard Granger. En 30 ans, Jean-Louis Gauthey rappelle que dans les grandes étapes connues par Cornélius, ils ont «surtout connu des bas pour être honnête».

«Très rapidement, la société a toujours eu des difficultés à finir ses fins de mois». Jean-Louis a même pensé arrêter Cornélius dans les années 2000. Cette résolution était pour autant impossible: «J’avais cet engagement vis-à-vis des auteurs et des autrices, mais aussi vis-à-vis des salariés. J’ai dû trouver d’autres solutions pour que ça se poursuive, moins pour moi que pour les autres finalement».

D’un premier échec au Fauve d’Angoulême

 

Jean-Louis Gauthey rappelle que l’activité de Cornélius a commencé par une grande catastrophe avec le premier livre qu’ils ont édité: Harlem, de Robert Crumb. «Je ne m’en rendais pas compte à l’époque, mais je travaillais avec des sources de mauvaises qualités. Je l’ai imprimé en sérigraphie. Beaucoup de gens ont pensé que l’impression était en cause. Le trait était un peu gras, alors qu’au contraire, j’avais fait très attention à cela!En fait, mes documents étaient mauvais». Il a stoppé la commercialisation de ce titre au bout de 3 semaines pour ne pas nuire à l'image de Cornélius. «Des catastrophes comme celle-ci j’en ai à la pelle!», dit-il avec le sourire aujourd’hui. Lors des 15 premières années, Jean-Louis pense avoir refait «au moins 10 ou 15 livres». Il relativise: «Maintenant ça se produit rarement. C’est aussi ces erreurs qui m'ont sauvé, voir guidé. Ca m’a donné une force dans la qualité et l’exigence des produits que je propose. J’ai une responsabilité auprès de mes employés et des lecteurs/lectrices».

Il y a eu une étape clé, qui a marqué Cornélius. En 2007, ils sont récompensés du Fauve d’or/Prix du meilleur album d’Angoulême avec NonNonBâ de Shigeru Mizuki, « une véritable récompense, une consécration » pour Jean-Louis. «C’était un auteur qui n'intéressait personne en France, moi je le trouvais génial. On a vendu 40 mille exemplaires de ce livre et on continue encore à bien le vendre, c’est un véritable succès fou» présente-t-il. Plusieurs autres distinctions suivront pour les œuvres de Cornélius: d’un Prix de la série pour Fuzz et Pluck de Ted Stearn, le Prix Révélation au festival d'Angoulême pour Mauvaises filles de Ancco, et Prix du Patrimoine au festival d'Angoulême pour La main verte.

Une maison d’édition de traductions pour collectionneurs: NON

En 30 ans, Jean-Louis Gauthey se dit «satisfait» du catalogue qu’ils proposent: «Globalement, on fait peu d'erreurs. Après on peut apprécier ou pas notre catalogue, mais par rapport aux enjeux qui étaient les nôtres, notre ambition aussi, j’estime que l’on a fait très peu d'erreurs». Le fondateur a conscience que Cornélius a longtemps été jugé comme une maison qui ne fait que de la traduction. Mais «c’est complètement faux».

Ce n’est pas la seule fausse étiquette attribuée à Cornélius. Jean-Louis Gauthey en a conscience afin d'y réagir efficacement: «J’essaye aujourd’hui d'être au courant de la façon dont on est perçu. Par exemple, quand on nous a considérés comme un éditeur d’art, pour les collectionneurs, ça ne m'allait pas. Ce n’était pas du tout ce que je recherchais. Je ne cherchais pas à travailler pour des gens qui ont beaucoup d’argent. Je voulais, au contraire, offrir une qualité à un prix raisonnable. J’ai alors tourné le dos à la sérigraphie, en 1998».



Célébrer les 60 ans?

Jean-Louis Gauthey ne sait pas encore si Cornélius est reparti pour un cycle de 30 ans. «Ça fait partie de ma vie, tant que je vivrais il y aura une activité qui se poursuivra». Il présente que des évolutions pourront survenir dans les prochaines années: «Je ne suis pas certain que ce sera toujours moi qui assurera cette activité. Ça ne m’étonnerait pas, qu’un jour, mes collègues prennent plus d’importance que moi!».

Jusqu'à la fin de l'année, Cornélius lance une grande opération afin de faire (re)découvrir une sélection d'ouvrages qui ont marqué l'histoire de leur catalogue. Ils ont rassemblé un échantillon de 30 livres représentatifs de leur ligne éditoriale éclectique. Pour l'achat en librairie de deux livres tirés de cette sélection «30 ans», le lecteur se verra offrir un exemplaire de leur revue Nicole.

Née en 2014, cette revue annuelle propose plus de 300 pages avec des bandes dessinées inédites ou qui sont devenues introuvables avec les années. Un trésor du neuvième art qui pourrait devenir l'un de vos rendez-vous annuels de bédéphile! 

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