Après sa série western Catamount, Benjamin Blasco-Martinez dessine Wiloucha, Les Dernières Heures de Troie, un one shot aussi historique que dense scénarisé par Mickaël Coadou et colorisé par Émilie Beaud. Entretien croisé avec le scénariste et le dessinateur pour la sortie de leur album aux éditions petit à petit.
Quel est le point de départ de Wiloucha, les dernières heures de Troie ?
M. C. : Il faut remonter à très loin : la première version, Aristarque qui date de 2014. Je suis alors professeur de français-latin en collège. Je faisais travailler mes élèves sur l’Antiquité et ils avaient écrit un petit roman interactif sur la guerre de Troie. Je m’étais toujours dit que ça pourrait faire une BD. Et le projet a mûri.
De quelle façon cette aventure a vraiment commencé avec Benjamin Blasco-Martinez ?
M. C. : Je n’y connaissais rien à la BD, je n’avais pas les codes. J’ai écrit différentes moutures de scénarios et j’ai démarché des éditeurs, mais je n’avais pas de dessinateur et c’est très compliqué d’en trouver un qui soit intéressé par l’Antiquité. Je suis tombé sur Benjamin, il a accepté, mais je devais attendre, car il était alors très pris par Catamount, sa série western.
Benjamin, dessiner le cheval de Troie dans un album historique et des chevaux de cow-boys dans un western, c'est le grand écart...
B. B.-M. : C’est vrai. Mais Mickaël avait pensé cette BD comme un western avec trois personnages centraux qu’on pourrait comparer au Bon, à la Brute et au Truand. J’ai trouvé le scénario original et très sombre, violent, j’ai constaté qu’il n’hésitait pas à aller dans les thèmes de l’incendie, le massacre, le viol, le brutal : ça m’a marqué et je me suis dit qu’il y avait quelque chose d’intéressant à faire. Plus globalement, j’aime bien l’Histoire, en particulier l’Antiquité avec les Romains, la Grèce antique… J’ai toujours aimé le péplum.
Comment avez-vous travaillé ensemble ?
B. B-M. : Je dessinais Catamount et j’ai commencé à travailler sur Aristarque, la première version de Wiloucha. En 2018,Mickaël a changé de direction. Il manquait la petite originalité qui fait la différence : parler du peuple hittite, car Troie se trouvait aux portes de l’empire hittite. On a pu se rencontrer, car Mickaël m’a fait intervenir dans son collège sur des projets pédagogiques : la sorcellerie, le héros, Thésée et le Minotaure…
© Petit à Petit, 2023
La densité historique du sujet ne vous a pas donné envie d'écrire une série plutôt qu'un one shot ?
B. B.-M. : À un moment, Mickaël était parti sur une histoire en trois volumes. Mais finalement, on a préféré faire un seul volume épais. On a choisi un découpage assez dynamique pour resserrer le rythme.
M. C. : Cette BD avance avec l’idée d’une machine qui s’emballe et ne s’arrête plus. Il y a eu plusieurs bandes dessinées sur la guerre de Troie. Mais, à ma connaissance, aucune sur les Hittites.
Qu'est-ce qui vous a le plus plu dans cette aventure ?
M. C. : Le côté jubilatoire de l’écriture. Je suis prof et pour moi, ce travail était fait de parenthèses enchantées, il m’a permis de me laver la tête et de mener une reconstitution historique : j’ai adoré cela. Les Hittites sont un peuple assez peu connu : c’était même une sorte de chasse gardée jusqu’à ce qu’on se plonge dedans avec Benjamin. Il y avait donc tout à faire, avec une infinité des possibles très jouissive. Cette BD a été une aventure humaine avec Benjamin : c’est un peu comme en amour, c’était à chaque fois des bons moments.
B. B.-M. : L’opportunité de dessiner les Hittites m’a cependant demandé unimportant travail documentaire, sans parler de la recherche de croquis, les dessins pour trouver des armures, des tenues vestimentaires, le palais... Mickaël m’a beaucoup aidé dans. J’ai fait plein de visionnages pour les recherches. Le côté grec est hyper intéressant, mais il m’était plus familier que celui des Hittites. Ce qui m’a plu dans le projet, c’est aussil’opportunité de prendre mon temps, avec, notamment, une bataille qui dure plus de dix pages et dans laquelle on suit un personnage de A à Z. J’ai varié les approches.
Effectivement, les scènes de batailles sanglantes ne manquent pas. Est-ce que ce sont les plus difficiles à dessiner ?
B. B.-M. : C’est effectivement plus complexe, car il y a beaucoup de mouvement. Il faut chercher des angles de vue intéressants, placer la caméra au bon endroit, maîtriser l’anatomie, ce qui n’est pas facile à faire dans un style réaliste. Maiscurieusement, plus il y a de monde et de mouvement à dessiner, plus c’est dur et plus je suis à l’aise. J’arrive à trouver des angles et ça m’amuse : c’est ça qui est le plus intéressant.
M. C. : Oui, on s’est beaucoup amusés. Je me posais depuis longtemps la question de savoir comment avaient fait les gens pour éviter de mourir dans Troie. Y répondre était assez jubilatoire. On a essayé de faire en sorte que chaque élément réponde à un autre. Cette BD est un jeu d’échos et de miroirs.
D'autres projets ?
M. C. : Oui, une sorte de Seven dans la Rome antique sous le règne d’un empereur. Mais les dessinateurs sont tous très occupés, donc je vais attendre que Benjamin soit dispo. J’ai aussi un très bon contact avec le Brestois Gildas Java qui a dessiné le premier tome d’Alexandre.
B. B-M. : Une série SF en trois tomes qui s’intitulera Noir horizon et sortira en trois tomes chez Glénat. Le scénario est écrit par Philippe Pelaez.
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