Le manga Minuscule, sorti en début d'année aux éditions Komikku, nous avait conquis avec les histoires ordinaires de ce petit peuple extraordinaire, poétiques et pleines d'humour. Entretien avec son auteur, Takuto Kashiki, qui était en France pour présenter sa première série et rencontrer ses lecteurs français.
Fasciné par le tout petit et la cuisine
Qu'est-ce qui vous a donné envie de devenir mangaka ?
Takuto Kashiki : Ce n'est pas que je n'ai jamais voulu devenir mangaka, mais ce n'était pas une idée très précise dans ma tête. Tout ce que je savais c'est que j'aimais dessiner. Je voulais faire quelque chose en rapport avec le dessin. Je me disais que si je pouvais dessiner des mangas dans des fanzines, ça suffirait à mon bonheur. Ce n'était pas une idée fixe.
Mais j'ai quand même fait des études dans une université spécialisée dans les mangas. J'ai dessiné quelques mangas dans des fanzines pendant mes études, puis j'ai continué une fois mes études finies. C'est là que mes dessins ont été repérés par Madame Morioka [Natsuyo Morioka, de la maison d'édition japonaise Enterbrain N.D.L.R.], qui allait devenir plus tard mon éditrice. Nous avons sorti ensemble trois one-shots, dont un qui racontait déjà l'histoire d'Hakumei et Mikochi. Comme il a eu beaucoup de succès, nous avons décidé de le transformer en série.
D'où est venue l'idée de l'histoire de Minuscule ?
Depuis que je suis petit, j'adore lire des livres illustrés qui racontent des histoires de petites souris ou de petits personnages, comme par exemple les aventures de la famille souris de Kazuo Iwamura. J'aime bien aussi regarder les dessins animés avec des personnages de petite taille. Donc j'ai toujours voulu dessiner un manga avec ces petits personnages.
Vos héroïnes, comme la plupart des personnages de ce manga, sont des femmes, alors que les personnages masculins sont réduits à des personnages secondaires, pourquoi ce choix ?
Vous verrez que dans les tomes 2 et 3, qui sont sortis au Japon et vont bientôt sortir en France, il y aura plus de personnages masculins. Mais c'est vrai que dans le premier tome, il y a beaucoup de femmes. D’abord parce que j'adore dessiner les personnages féminins, ensuite parce que je voulais surtout dessiner deux personnages qui vivent ensemble. Si ça avait été un homme et une femme, ça serait tout de suite devenu une histoire d'amour. Et deux hommes, je ne trouvais pas ça marrant. C'est pour ça que je me suis tourné vers deux femmes.
Le thème de la cuisine est récurrent et vous faites une description détaillée de certains plats et aliments qui mettent l'eau à la bouche. C'est un domaine important pour vous ?
Oui, moi-même j'adore cuisiner, aller chercher les ingrédients pour faire ma cuisine et puis évidemment j’adore manger. Donc pour moi, c'est toujours un plaisir de dessiner tout ce que j'aime. Et puis quand on dessine des personnages qui mangent, ça créé toujours une ambiance sympathique. C'est pour ces deux raisons que j'ai dessiné pas mal de scènes de repas.
Une histoire apaisante
Les humains ne sont jamais présents, le peuple de Minuscule vit comme coupé de ce monde. Pourquoi ce choix de ne pas les faire interagir ?
Je n'ai pas beaucoup pensé à cet aspect, parce que pour moi Hakumei et Mikochi sont des humains, sauf qu'ils sont plus petits que nous. Et mon souhait c'est que mes lecteurs pensent que ce sont vraiment des humains.
Vous avez un trait très détaillé et réaliste pour représenter la nature et les animaux. Est-ce que vous vous documentez beaucoup ? Avez-vous un assistant pour vous aider ?
J'ai un assistant, mais il ne m'aide pas pour les dessins en eux-mêmes. C'est moi seul qui dessine. C'est lui qui, par exemple, à la dernière étape pose les trames. Ou encore quand il s'agit de dessiner les choses en perspective, c'est lui qui va dessiner les lignes de fuite. Mais pour le dessin c'est moi.
Alors quand je veux dessiner quelque chose et que je n'y arrive pas, je me documente moi-même. Par exemple, quand je veux dessiner les racines d'un arbre mais que je ne sais pas comment le faire, je sors et je prends mon appareil photo. C'est comme ça que je fonctionne.
Quelles sont vos influences, les auteurs qui vous ont marqués ?
En ce qui concerne le graphisme, je pense que j'ai été influencé évidemment par Akira Toriyama et par Akihiro Yamada. En ce qui concerne la façon de faire le scénario, je pense surtout à un manga que j'adore qui s'appelle Dōbutsu no Oishasan, de Noriko Sasaki [non publié en France N.D.L.R.]. En français, ça signifie littéralement « le docteur des animaux ». Voilà pour mes influences manga. En revanche, je n'ai presque pas lu de BD franco-belge.
En France, Minuscule est présenté comme un manga tout public voire jeunesse, mais il a été prépublié dans un magazine seinen, Harta, au Japon. A quel public souhaitiez-vous vous adresser en écrivant ce manga ?
C'est consciemment que je n'ai pas voulu cibler telle ou telle tranche d'âge. Je considère que c'est un manga tout public. Effectivement, dans les courriers de lecteurs que je reçois, il y a quand même une grande majorité de gens qui sont dans le milieu de la vingtaine.
Mais je reçois aussi du courrier d'enfants d'école primaire et de personnes plus âgées de 50-60 ans. Il y en a pour tous les âges. Globalement, ce manga a reçu un très bon accueil sur le marché japonais et les lecteurs me disent souvent que c'est un manga apaisant pour eux.
Minuscule est prévu en combien de tomes ? Une adaptation en anime est-elle envisagée ?
Je ne sais pas du tout. Je ne réfléchis pas de cette façon là. En fait, à chaque fois que je fais un chapitre, je trouve les thèmes ou les histoires petit à petit. Les épisodes se font au fur et à mesure. Donc je vis un peu au jour le jour, je n'ai pas de vue à long terme. Et pour l'instant, je n'ai pas encore reçu d'offres pour une version animée.
Quels sont vos projets ? Avez-vous d'autres idées de série ?
Pour l'instant, j'ai vraiment la tête dans le guidon avec Minuscule, je suis dessus à 100 %. Malheureusement je n'ai pas vraiment le temps ni le loisir de penser à autre chose. Mais j'aimerais bien un jour pouvoir me libérer un peu, prendre de la hauteur et penser à autre chose aussi.
Toutes les illustrations de l'interview conportent le copyright suivant :
© 2013 Takuto Kashiki / PUBLISHED BY KADOKAWA CORPORATION ENTERBRAIN
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