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Groom, zapping intelligent de l’actualité 2015

Pour Groom, José-Luis Munuera et Nob ont mis en BD La crise des réfugiés. Aiguillés par Damien Perez, le rédacteur en chef, José-Luis Munuera a mis en scène des dinosaures en quête d’une terre fertile et Nob le périple d’un petit garçon qui se terminera sur le rivage de l’Europe. Ils nous ont confié tous les deux ce qui les a fait participer à ce nouveau journal.

Un exercice difficile donc intéressant

Comment avez-vous été embarqués dans l’aventure Groom ?

Nob : Je suis assez souvent en contact avec l’équipe de Spirou, vu que Dad parait régulièrement dedans. C’est là que j’ai connu Damien Perez et quand il m’a parlé du projet j’ai directement dit oui !

Extrait de Voir la mer de Nob

Extrait de Voir la mer de Nob

Quand il m’a soumis trois-quatre sujets dans lesquels je pouvais piocher, je pense qu’il avait déjà une idée derrière la tête. Bien sûr le thème des migrants n’était pas facile à traiter mais du coup ça m’intéressait beaucoup !

José-Luis Munuera : Je suis très fier d’avoir participé à cette initiative ! Damien Perez m’a appelé pour me donner le sujet sur lequel il me voyait bien travailler : l’immigration. C’est déjà un sujet fort délicat en lui-même et il l’est encore plus pour moi, vu que j’habite au Sud de l’Espagne, qui est un des portes d’entrée des refugiés. Sur les plages où je vais nager l’été avec mes enfants, il y a des petits bateaux avec des immigrants qui arrivent.

Ce sujet me touche donc de façon directe. À tel point que j’ai voulu le traiter de manière indirecte. J’ai décidé de faire une fable animalière et en y réfléchissant, j’ai opté pour les dinosaures.

Extrait de Terre Fertile de José-Luis Munuera

Extrait de Terre fertile de José-Luis Munuera

Tous les deux, vous avez choisi des points de vue très particuliers :

José-Luis Munuera : Grâce aux dinosaures, j’ai pu essayer de montrer les différents points de vue. D’un côté, j’ai pu mettre en avant l’émotion liée au père et son enfant à la recherche d’une terre pour survivre. On se rend bien compte qu’ils sont en danger mais les gardiens du monde fertile donnent aussi leurs raisons, qu’on peut approuver ou pas, de ne pas les accueillir. Exposer le sujet sans le juger était très intéressant.

Grâce à l’équipe du journal, j’ai modifié surtout les figures des carnivores qui ne veulent pas laisser de la place dans leur sanctuaire aux migrants. Je les avais créés beaucoup plus méchants, alors qu’il faut aussi nuancer ce point de vue en exposant leurs raisons de refus.

Nob : Pour moi, le choix du point de vue d’un enfant offrait un regard neutre : le héros découvre en même temps que le lecteur ce qui se passe autour de lui. En plus comme il a grandi dans un pays en guerre, il ne comprend pas pourquoi ce n’est pas « normal ». Il n’a pas de regard négatif sur ce qu’il quitte : c’est en tant qu’adulte qu’on sait ce qui se joue vraiment dans son voyage pour « Voir la mer ».

Avant-dernières cases de Voir la mer de Nob

Avant-dernières cases de Voir la mer

Finalement, j’ai choisi le même point de vue que dans Les Souvenirs de Mamette : un enfant vit quelque chose qui le dépasse un peu, ce qui fait cohabiter la petite histoire et la grande. Le petit, il veut rester avec son doudou, ne pas être malade dans le bateau : des préoccupations d’enfant universelles et simples, malgré la situation « exceptionnelle ».

Dernières cases de Voir la mer de Nob

Dernières cases de Voir la mer

Vos deux chutes sont marquantes : d’un côté une météorite annonce la fin des dinosaures et de l’autre un doudou se retrouve échoué, seul, sur une plage…

José-Luis Munuera : La météorite est un fait réel : les dinosaures ont disparu. Mais avec cette chute, je donne aussi mon point de vue sur l’idée qu’empêcher les gens de venir se réfugier chez soi empêche la catastrophe.

Nob : Il y a des choses que je ne montre pas mais laisse la place au lecteur pour qu’il y mette sa propre émotion. Au début, Damien voulais plutôt que je parle de petit Aylan et de son parcours. Mais je préférais plutôt montrer qu’il y a plein de petits Aylan. La fin de l’histoire aborde l’histoire d’Aylan mais de manière détournée.

Dernières cases de Terre fertile

Dernières cases de Terre fertile

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Commentaire (1)

Beaucoup de poésie et au final de tristesse sur l'histoire du petit garçon qui nous fait forcément penser au petit Aylan, qui est aujourd'hui dans notre subconscient. C'est beau et on ressent beaucoup d'émotion... rien à voir avec la très médiocre caricature du 13 janvier dans Charlie Hebdo, jeu des pires amalgames, lorsque Charlie assimile le petit Syrien trouvé mort aux auteurs des agressions sexuelles à Cologne. Merci Messieurs pour ce très beau moment.

Le 23/01/2016 à 20h07