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Marc Lizano et le monde de l'enfance

En début d'année, Marc Lizzano a sorti simultanément deux BD jeunesse, l'une en tant que scénariste, l'autre en tant que dessinateur et chacune dans des genres bien différents. Rencontre avec un auteur multiple, tant dans ses univers que dans ses projets.

Deux projets inspirants

Comment êtes-vous venu à la BD ?

J'ai fait beaucoup de fanzines et de micro-édition. J'étais dans l'association Oh la vache ! où je travaillais avec des gens comme Lidwine, Fournier, Baudoin... J'étais aussi dans la Fédération française de comics, Hybrid comics... J'ai fait des livres avec des styles et des univers très différents : pour les tout petits, de la BD intimiste, des adaptations chez Noctambule... Maintenant je vais essayer de plus me consacrer à la jeunesse et aux BD muettes. C'est là que s'épanouit le mieux mon dessin et ce sont aussi mes livres qui marchent le mieux. J'ai de la demande, ça génère aussi des interventions en classe... J’adore le contact avec les petits.

Extrait de Père et Fils (Lizano, Ulf K.)

Extrait de Père et Fils (Lizano, Ulf K.)

Vous sortez une adaptation de Vater und Sohn  d'Erich Ohser, pourquoi avoir repris ce travail ?

C'est une œuvre très connue en Allemagne, l'équivalent de Bécassine chez nous au niveau du patrimoine en quelque sorte. Au départ, le projet n'était pas une reprise. L'éditeur Panini avait traduit en Allemagne L'enfant cachée et La petite famille, et il m’a demandé si j'avais des projets à proposer directement à l'éditeur allemand.

J'avais pensé à un biopic de l’auteur, qui était dessinateur de presse. Il était social-démocrate et, en 1933 quand les nazis ont eu les pleins pouvoirs, il a arrêté le dessin politique pour la BD muette. Ça a été un carton total en Allemagne. Malheureusement, il s’est fait arrêter pour défaitisme pendant la guerre, son éditeur a été pendu et lui s'est suicidé en prison. Je suis en train de traduire sa biographie qui existe en allemand, mais c'est long et l'éditeur trouvait trop compliqué de vendre ce projet. Quand on en parlait, les personnages sont devenus libres de droit et ça faisait des années que je voulais travailler avec Ulf K., un dessinateur allemand. Ça tombait très bien !

Extrait de Père et Fils (Lizano, Ulf K.)

Extrait de Père et Fils (Lizano, Ulf K.)

En fait, les Allemands n'osaient pas reprendre cette œuvre. Pour moi, il y a moins d'enjeux... et les gens m'ont fait de super retours. On a essayé de coller à l'esprit d'origine mais en le transposant à notre époque : on a ajouté des jeux vidéo et le papa ne donne plus de fessées ! On s'est adapté. On a sorti deux tomes en Allemagne et le premier est paru en France.

Vous sortez en même temps le premier tome de La Pension Moreau, comment est né ce projet ?

Le nom vient de L’île du Dr Moreau, et le fait de mettre des animaux comme personnages n'est pas du tout gratuit. On travaille sur la violence, la part d'animalité et Benoît est parti des bagnes d'enfants, dont un notamment à Belle-Ile, où naquit la révolte de 1934 et qui a donné la célèbre chanson de Prévert La chasse à l'enfant. Dans ces bagnes, les gosses étaient traités comme des esclaves. J'ai hésité à travailler en bichromie comme j'avais pu le faire sur Cheval d'orgueil et L'Ile aux 30 cercueils. La difficulté, c'est que ce récit s'adresse à des enfants, à partir de 8-9 ans et comme il est déjà sombre, on a opté pour la couleur.

La Pension Moreau (Lizano)

La Pension Moreau (Broyart, Lizano)


Justement, comment avez-vous travaillé pour le dessin ?

Je travaille à la plume et au crayon. Pour chaque page, il y a un crayonné : le dessin n'est pas précis, il s'agit surtout de mise en place. J'affine ensuite, quand je travaille avec la plume et l'encre. Puis je scanne et on fait les couleurs à l'ordinateur. C'est très long, une planche prend entre deux jours et une semaine de travail. Pour le premier tome, j'étais en même temps sur Cheval d''orgueil, mais j'ai dû interrompre le travail sur La Pension Moreau pour mieux y revenir après. Avec une trilogie, tu ne peux pas te permettre de traîner : je veux qu'elle soit terminée assez vite !

La Pension Moreau (Lizano)

La Pension Moreau (Broyart, Lizano)

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Commentaire (1)

Superbe interview d'un auteur que j'adore. A noter également la réédition des dessins originaux de Vater und Sohn chez Warum ! voici le lien de l'album : http://culturebd.com/album-bd/207738-pere-et-fils

Le 02/06/2017 à 12h58