Il est donc le rédacteur en chef de ZOO le temps d’un numéro. James est aussi le responsable de la collection Pataquès ainsi que son Community Manager. Lancée il y a cinq ans maintenant, cette collection d’humour aux éditions Delcourt a su développer une identité bien à elle face aux grands concurrents installés dans le monde du 9e art. Découvrez comment deux doigts de mauvais esprit ont conduit à la création d’un tel pataquès…
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Bernstein, Witko, Arthur Levrard, Ami Inintéressant et Rémi Lascault
James, les lecteurs vous connaissent bien en tant qu’auteur de bande dessinée d’humour. Qu’est-ce qui a fait de vous un directeur de collection ?
James : Guy Delcourt, forcément ! En 2017, j’ai appris qu’il voulait développer, avec son directeur général de l’époque, Patrice Margotin, une collection de BD spécialisée dans l’humour. Pendant un festival d’Angoulême, tard le soir au bar de l’hôtel Mercure, j’ai pu leur présenter mes intentions. On s’est donné rendez-vous à Paris et je suis arrivé cette fois avec un plan plus précis, des noms d’auteurs, une stratégie digitale et un Fabcaro sous le bras.
Comment étiez-vous préparé pour répondre à une telle demande ?
James : J’avoue que je ne partais pas du tout de rien. En 2012, j’avais créé avec Boris Mirroir et Laurent Parez un magazine numérique, Mauvais Esprit. C’était déjà de la BD d’humour, mais pensée pour des formats adaptés à la lecture sur smartphone ou tablette. On a publié pendant un an et demi, mais cela n’était pas rentable et donc ça s’est arrêté.
Quand j’ai appris pour le projet Delcourt, j’ai pioché dans cette expérience. Pan ! T’es mort ! de Guillaume Guerse et Terreur Graphique, ou Mortel, de Marc Dubuisson et Thierry Martin, avaient commencé dans Mauvais Esprit.
Mon expérience d’auteur m’avait montré que le format classique de l’humour BD franco-belge était beaucoup trop compliqué. J’étais pour ma part adepte du format court, du strip, de la demi-page.
Quel a été l’axe central de votre proposition à Guy Delcourt et Patrice Margotin ?
James : Le format. Mon expérience d’auteur m’avait montré que le format classique de l’humour BD franco-belge était beaucoup trop compliqué. J’étais pour ma part adepte du format court, du strip, de la demi-page. Un gag en planche, pour moi, c’est beaucoup d’efforts délivrés sur 12 cases pour arriver à une chute. En 6 cases, on doit beaucoup plus composer avec le rythme. Je trouve cela plus efficace.
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James, Fabcaro, Evemarie et Chavant
La collection Pataquès est très visible sur Instagram. Était-ce aussi un élément important de votre proposition ?
James : Mon travail est très lié à Internet. Je suis issu de la génération blog, quand j’ai commencé en 2005 Les Mauvaises Humeurs de James et la Tête X. C’était un lien direct avec les lecteurs et les éditeurs, avec une production très rapide, dans un flux direct.
Mais les réseaux sociaux ont tué les blogs. Alors oui, j’ai préféré ce support. Parce qu’en plus, cela constituait un engagement vis-à-vis des auteurs. Comme beaucoup, je me lamentais sur le fait que les éditeurs ne poussaient pas assez les livres, même sur internet. Alors on a pensé ce compte Instagram qui permet 4 à 5 mois de communication autour des titres, en amont de la sortie et après.
Quel est l’impact de cette stratégie de communication ?
James : On remarque qu’il n’y a pas de logique entre ce qui fonctionne sur Instagram et en librairie. Quelqu’un comme Fabcaro n’est pas présent sur les réseaux sociaux, il n’en a pas besoin. À l’inverse, des auteurs fonctionnent très bien en ligne, mais ne vendent pas dans les mêmes proportions en librairie.
Au lancement, vous aviez vos réseaux. Mais comment repérez-vous les auteurs qui alimentent la collection ?
James : Certains auteurs sont des amis, j’ai envie de travailler avec eux, en sachant qu’ils peuvent me proposer des choses intéressantes. Mais j’utilise aussi Instagram pour repérer de nouveaux auteurs ou pour les contacter si ce sont des anciens que je ne connais pas encore personnellement.
Avant, la BD d’humour reposait sur un personnage. Maintenant, je pense que c’est sur un thème fort.
Quelle est la ligne éditoriale, sur le fond, de Pataquès ?
James : En plus des formats, je recherche un humour en phase avec son époque, qui traite de sujets sociétaux. Avant, la BD d’humour reposait sur un personnage. Maintenant, je pense que c’est sur un thème fort.
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RaphaëlB., Karibou, Arnaud De Viviers, Marc Dubuisson et Thierry Martin
Certaines voix trouvent que l’époque est compliquée pour l’expression de l’humour. Partagez-vous ce ressenti ?
James : Non. Pour moi, si l’humour est bon, il n’y a pas de problème à la lecture. On peut quasiment tout dire aujourd’hui, il faut simplement choisir la façon de le faire. Avec Genèse et Prozac de Rémi Lascault et Ami Inintéressant, qui est sorti cet hiver, on va dans une forme de blasphématoire, mais ça passe tout seul, parce qu’ils font cela bien.
Quels ont été les succès et déceptions de ces cinq premières années ?
James : Fabcaro faisait évidemment partie des succès attendus, mais je suis vraiment content des ouvrages qu’il a produits pour nous. Succès moins attendu, celui de Salade César de Karibou et Josselin Duparcmeur. Il a permis de sortir un titre supplémentaire sur Napoléon, et un autre est à venir sur la guerre de Troie. Un de mes livres préférés de tous les temps est dans la collection, c’est Amour Djihad et RTT de Marc Dubuisson. Ces différents titres sont importants, car ils permettent à la collection dans son ensemble de vivre.
Mais si je devais citer une déception, purement d’ordre commercial, ce serait L’Encyclopédie non exhaustive des savoirs approximatifs de M. la Mine, un chef-d’œuvre méconnu. L’ouvrage est sans doute un peu trop conceptuel, ce n’est pas de la BD pure, donc c’est sûrement moins vendeur. Je suis toujours désolé pour l’auteur quand un super travail ne reçoit pas l’accueil qu’il devrait avoir.
Nous avons exploré ensemble les débuts de Pataquès. maintenant, quelles sont les perspectives pour les mois à venir ?
James : Nous restons dépendants de l’avancée des différents projets. Je ne stresse pas les auteurs sur les rendus. Pour la rentrée, nous misons sur des valeurs sûres. Nous rééditons par exemple Talk Show de Fabcaro, en novembre. En 2024, je compte sur un Marc Dubuisson en solo et sur d’autres collaborations entre Karibou et différents auteurs. Nous proposerons d’ailleurs un tome 2 à son Dialogues, dont le premier volet sera réédité dans la collection. Et puis je suis ravi, car Fabrice Erre a enfin pu nous proposer un projet pour le premier semestre 2024.
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