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Madeleine résistante, pas victime

Une vie de passion, de combat contre tout ce qui pouvait mettre à mal son sens inné de la justice et de la liberté, Madeleine Riffaud est un cas unique. Le premier tome de Madeleine, résistante (Aire Libre) a réuni tous les suffrages. Le tome 2, l’Édredon rouge de Morvan et Bertail sort en août.

Jean-David Morvan : Madeleine résistante, pas victime

© Dupuis, 2023

Madeleine Riffaud a 98 ans et comme l’assure le scénariste Jean-David Morvan « elle est en pleine forme ». Trois fascicules anticipent comme pour le tome 1, la publication du 2. « On y voit le quotidien d’un résistant. On montre au jour le jour comment fonctionnait un réseau à Paris au moins. Comment on se retrouvait, on écrivait des messages codés sur des tickets de métro pour que les Allemands ne comprennent pas en cas d’arrestation, les liaisons radios clandestines vers Londres, voler des armes aux Allemands ou des machines à écrire pour faire les tracts. Les amis tombent et elle prend des responsabilités. Elle devient FTP (Franc-Tireur Partisan d’obédience communiste) à la suite des membres de l’Affiche Rouge, le groupe Manouchian décimé par la Gestapo ».

Madeleine a choisi et ce n’est qu’un début. Elle va aller au bout de son engagement alors qu’être une femme ne lui facilite pas la tâche, un certain machisme oblige. Comme le rappelle Morvan « elle vient d’un milieu de gauche mais quand on s’engageait dans la Résistance on allait où on voulait de vous. Dans le tome 2 on est passé à 120 pages. On est un mois avant la libération de Paris le 23 juillet 1944. J’aurais pu faire 80 pages de plus. L’album finit quand elle tue un officier allemand et qu’elle est arrêtée ».

Madeleine, surnommée Rainer en 1944, représente une vague inattendue porteuse d’espoir qui permet à un nouveau lectorat de découvrir le combat, les valeurs d’une femme qui affronte les extrêmes, du nazisme au colonialisme quand elle sera ensuite grand reporter de guerre au Vietnam ou pendant la guerre d’Algérie.

Une éternelle survivante

Comment a-t-elle géré l’énorme succès de cet album ? « Elle est contente » assure Morvan, « avec par exemple des affiches dans le métro pour le livre où on dit je ne suis pas une victime, je suis une résistante. C’est le message qu’elle voulait transmettre comme Aubrac le lui avait demandé. Elle peut continuer à témoigner avec la BD alors qu’elle est bloquée chez elle. Elle a compris la BD. Elle a un cerveau d’exception et ne vit pas dans un monde à l’arrêt. La BD est devenue son moyen d’expression et elle a coscénarisé la série qui comportera sept albums ».

Et puis complète Morvan, « l’histoire est belle, vraie, concerne les gens. La force du dessin de Bertail est capitale, apporte toute sa puissance avec la teinte bleue de fond. Madeleine a toujours intéressé les autres. Elle ne voulait pas que la France qu’elle avait défendue se comporte comme les nazis dans les colonies. On a réussi à imposer le personnage par la progression dans le premier tome ». Madeleine est une éternelle survivante. Elle a eu le Covid ce qui à son âge a été difficile, hospitalisée. Elle résiste, ne cesse jamais la lutte, avec une volonté de fer, une passion pour la vie. « Au début les lecteurs », ajoute Morvan, « quand ils lisent Madeleine, pensent qu’elle parle au scénariste. Très vite ils réalisent que c’est à eux qu’elle s’adresse. Souvent dans les BD historiques actuelle on est dans du Wikipédia sans intériorité. Avec Madeleine on continue sa pensée, on se fond dans son style. On n’est pas dans une BD classique, il y a l’attachement que l’on a pour elle qui a toujours su rester humble ». Le tome 2 est tout autant exaltant, prenant que le premier. Morvan brillant, Bertail sublime, et Madeleine sans concession.

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